samedi 10 septembre 2011

DANIELLE JACQUI ET SA MAISON MAGNIFIQUE !











DANIELLE JACQUI est une grande dame, DANIELLE JACQUI est une belle dame.

Ce qui m’a frappé aujourd’hui c’est l’impression qu’elle dégage d’avoir le temps, de prendre son temps, de ne pas travailler dans l’urgence.

Je ne sais pour quelles raisons je pensais rencontrer une femme forte et autoritaire et j’ai découvert une femme patiente, sereine, paisible, une femme confiante aussi,  capable d’évoquer son enfance , son besoin d’être reconnue, sa vie sentimentale, une femme facétieuse et sérieuse à la fois, une femme qui travaille à dominer ses peurs et qui semble avoir réussi, une femme qui avance dans la vie à pas de géant .

Nous n’avons pas découvert son œuvre dans l’ordre chronologique puisque nous avions le matin rendez-vous à l’Atelier à Aubagne.

C’est ainsi que nous avons tout d’abord vu ce que sera « Le Colossal d’Art Brut » et que nous avons appris les difficultés que rencontre DANIELLE JACQUI quant au choix de l’emplacement.

Après un premier projet sur la gare d’Aubagne, elle ne sait où ses céramiques prendront vie : à Lausanne au Musée d’Art Brut, chez elle près de sa belle maison ou ailleurs …..

Tout est en fait incroyablement, lamentablement difficile.

Je ne pensais pas que la Maîtresse de l’Art Brut, celle que Laurent Danchin appelle « le Facteur Cheval féminin », la créatrice de l’ORGANuGAMME, l’organisatrice du Festival d’Art Singulier d’Aubagne, la marraine du festival de Bézu pouvait être confrontée à de tels problèmes.

Certes la ville d’Aubagne met à sa disposition un atelier, du matériel, un four et des personnes pour l’aider mais comme pour Florence Marie et sa forge, Pierre Shasmoukine et Gorodka ce qui devrait être simple, facilité, génère des propos acerbes, des rivalités, des petitesses et de l’incompréhension.

Dali voulait faire de la gare de Perpignan le centre du monde, DANIELLE JACQUI aurait pu faire de celle d’Aubagne une attraction d’envergure nationale voire internationale.

Il serait regrettable que « Le Colossal » parte au Japon, aux USA ou en Suisse parce qu’aucune solution satisfaisante n’a pu être trouvée en France.

J’ai du mal à réaliser qu’un génie tel que DANIELLE  JACQUI ne vive pas dans l’opulence ou du moins dans le confort, confort de pensées du moins car je ne pense pas que l’argent mène sa vie et motive ses actes.

L’œuvre de céramique sera unique, démente, délirante, MAGNIFIQUE, vertigineuse!
Elle sera faite de milliers de plaques, de formes, de « longitudianales unicolores ondulatoires » , de personnages de 12 mètres de hauteur qui porteront les noms de Sacha (et son bleu DANIELLE JACQUI ), de Sylvie (la rouge), de Céleste (la verte). Elle représente 12 années de travail car le travail est au cœur de ce vaste projet.
Cette notion de travail qui est liée à DANIELLE JACQUI et qui revient de façon récurrente.
 Pas de vacances, un travail de 4 heures quotidiennes à l’Atelier, été comme hiver et la date de décembre 2012 comme une date butoir qui verra l’aboutissement d’un travail titanesque et presque inhumain, d’un travail gargantuesque , d’un travail « j’ai la bouche plus grande que le ventre » …et les rêves plus grands que la réalité .


Travail quasi obsessionnel « persévérer sur le challenge que je me suis fixée et ne pas perdre ma route en chemin » écrit l’artiste, parce qu’il s’agit bien en effet d’un challenge, d’un HENAURME challenge. Je n’ai pu m’empêcher de penser à Jean-Yves Jouannais et à sa quête guerrière : des années consacrées à l’Encyclopédie des Guerres, des années consacrées à un « Colossal d’Art Brut » … la même quête un peu folle mais si importante pour eux …et pour nous.

Après cette première visite nous sommes parties pour Roquevaire, Pont de l’étoile voir « La maison de celle qui peint ».

De nouveau le bonheur de la découverte devant une étonnante façade (4 fois refaite depuis 1985) faite de mosaïques de peintures, de broderies, de personnages mais surtout le choc en découvrant l’intérieur. Ici encore cette profusion qui émerveille et qui surprend ! Nous sommes dans une bienheureuse démesure. Le travail de DANIELLE JACQUI , comme l’a constaté Jeanine Rivais est pluriel : « Tenter face à la pluralité de son travail , de séparer sculpture, peinture, collage, broderie, couture est illusoire : des peintures en relief, des sculptures peintes, des broderies devenues robes, des poupées aux grands yeux étonnés …ramènent à l’unique réalité : l’univers coloré de DANIELLE JACQUI est un et indivisible. »

Ici encore la démesure ! 40 ans de vie qui vous sautent à la figure, qui vous étreignent le cœur, qui vous dilatent les pupilles. Pas un seul cm2 n’a échappé à la prolifique créativité de l’artiste. On se retrouve enfermé dans une maison-cocon mais aussi dans une maison qui vous absorbe, qui vous étouffe, vous fascine et vous renvoie peut être à votre propre néant, une maison-araignée mais qui ne vous donne pas envie de vous débattre, une maison-témoignage, une maison-jungle , une maison fascinante et enveloppante !

DANIELLE JACQUI évoque la possibilité de transformer cette maison en musée et de la quitter définitivement. A moi cela parait impossible mais le ton est catégorique et cette rupture envisagée ne fait pas peur à « celle qui peint ».

Peut être fait elle partie du passé ? " Elle appartient au XX ème siècle" dit l'artiste  et DANIELLE JACQUI fait résolument partie du XXI ème siècle et tend vers l’avenir ! Vers ce Colossal qui l’absorbe tout entière dont elle se nourrit et qui je l’espère ne se nourrit pas d’elle.
Deux images sont venues à mon esprit concernant DANIELLE JACQUI : Pénélope bien sûr qui sans cesse recommence son ouvrage mais Sisyphe aussi, Sisyphe et son douloureux rocher.

Se peut il que le travail reste une joie quand les incertitudes sont si nombreuses et que la tâche est si lourde ? Le plaisir est-il encore possible ?

L’œuvre de DANIELLE JACQUI est généreuse à plusieurs niveaux. Elle avait choisi de ne pas se faire payer et de faire « don » à la ville d’Aubagne mais il y a une autre dimension : « j’ai envie de réaliser une œuvre colossale pour ouvrir à tout un chacun la possibilité de devenir un architecte ou plus exactement un anarchitecte. »

Elle rejoint en cela le poète ferrailleur Robert Coudray : « j’ai aussi le grand désir que vous trouviez votre voie, fut elle simple, secrète et quotidienne »et pour lequel il faut « donner à voir pour donner envie de faire ».

Cette artiste boulimique a une ligne de conduite à l’image de celles qu’elle admire (Frida Kahlo, Diane Fossey , Simone de Beauvoir mais aussi Deidi von Schaewen dont elle parle avec beaucoup d’émotion ) elle devient une épopée et transforme sa vie en quelque chose de grand et d’incroyable . C’est elle le Colossal d’Art Brut !

Elle qui admire « les gens qui vont au bout de leurs rêves » transfigure le quotidien (avec sa maison) et transfigure l’avenir (avec son Colossal).

Laurent Danchin dans l’interview du 6 mai 2011 ( vidéo tournée pour le site de la Ville d'Aubagne par le journaliste Richard Guesnier)  dit : « Les gens viendront de partout pour voir ça, au moins à titre de curiosité. C’est unique. Un monument en céramique géant dans lequel on peut entrer, ça n’existe nulle part au monde. Une fois que ce sera en place les gens seront stupéfaits.»

Le projet est sidérant, la réalisation sera insensée, inouïe !

Mais pour l’instant le Colossal est en miettes et il faut trouver des solutions afin de rendre le rêve de DANIELLE JACQUI possible. « Je regarde sur le sol triste de cette salle la surface se remplir » écrit l’artiste,  mais cette structure poétique est faite pour sortir au grand air, pour vivre sous le soleil …et sous la pluie (la pluie ruisselant sur cette façade colorée et circulant dans chaque pièce devrait elle belle et réjouissante à voir), pour s’élever ; pour quitter le plan horizontal et grimper à la verticale !

« On dirait une broderie géante. Cela fait des bosses et des creux, des déliés, des vagues, cela se couche, s’écrase et se relève »…..jusqu’à l’élévation finale !

« Il est grand temps de rallumer les étoiles » disait Apollinaire, il est temps d’aider DANIELLE JACQUI à trouver un nouveau « lieu phare » (moi je reste persuadée que le choix de la gare d’Aubagne était le plus judicieux).

DANIELLE JACQUI a su transcender son environnement, elle l’a prouvé avec sa maison, laissons la transfigurer Aubagne !

Des gares comme celles d’Aubagne il y en a plusieurs dans la région ( à Cavaillon, à Gardanne..), la Gare-Colossale serait elle UNIQUE !

DANIELLE JACQUI appartient à la « catégorie des bâtisseurs de l’imaginaire, les Tatin, les Picassiette » disait elle Jeanine Rivais , alors faisons lui confiance.

Désormais à la personne de DANIELLE JACQUI est accolé le mot ORGAnUGAMME , laissons la imaginer des mots, des concepts ET des lieux. Laissons les prudents, les peureux, les sans-imaginations et lançons nous avec elle dans ce rêve fou et extravagant !

Laissons se réveiller et grandir le monstre tapi et endormi, laissons les céramiques prendre vie !!!

Camus voulait imaginer Sisyphe heureux moi j’aimerais voir DANIELLE JACQUI heureuse et fière de son « Colossal d’Art Brut » afin qu’elle puisse partir vers de nouvelles aventures car je suis sure qu’à 75 ans DANIELLE JACQUI n’est pas de celles qui se reposent, n’est pas de celles qui se contentent mais de celle qui « font crier l’eau vive » !

DANIELLE JACQUI LA LUXURIANCE FAITE FEMME !


DANIELLE JACQUI FEMME ÉPIQUE, GÉNÉREUSE ET VERTIGINEUSE !











































1 commentaire:

  1. « J’ai du mal à réaliser qu’un génie tel que DANIELLE JACQUI ne vive pas dans l’opulence ou du moins dans le confort, confort de pensées du moins »

    C’est en effet une réalité que nous côtoyons souvent, mais à laquelle nous ne nous habituons pas. Et c’est bien : il ne faut pas s’habituer à l’insupportable médiocrité.
    Dans l’œuvre présentée et par ce que vous en dites (en rapport avec la découverte de l’intérieur de la maison), on trouve exactement ce qui habite la plupart des créations de l’art brut : la saturation de l’espace, cette profusion qui fait que par rapport à l’élan créateur, le support est toujours trop petit – quand bien même ce serait la gare d’Aubagne !
    Alors oui, il faut se joindre à ceux qui se battent pour faire que cette œuvre s’installe dans un lieu qui lui convienne (sûrement pas à Lausanne qui est déjà saturé).
    Dites-nous, Sophie, dire comment nous pourrions – avec vous – envisager d’aider cette artiste ? J’ai vu qu’il existait une association d’amis de Danielle Jacqui : ces gens-là ont sûrement déjà entamé du lobbying ; peut-être faudrait-il les rejoindre ?

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