Travail maintes fois croisé et aimé au fil de nos périples et puis tout à coup une présence quasi quotidienne de splendides dessins sur Facebook et l'envie de consacrer enfin une page à cet artiste
exceptionnel avec quelques visuels d'hier et d'aujourd'hui ....
" Les lignes de Jean-Christophe Philippi s’approchent, se
rencontrent, se coudoient. Elles se touchent. Elles voisinent. Elles se
frottent. Elles sont serrées. Elles se joignent. Parfois, elles se greffent.
Elles s’accolent. Elles s’entrelacent. Elles s’étreignent. Elles se pressent.
Elles s’entassent. Elles s’accumulent. Elles se rassemblent. Parfois, elles se
superposent, elles s’enchevêtrent, elles se brouillent. Elles peuvent se mêler.
Elles se tressent. Elles se tordent. Elles se déforment. Elles se courbent.
Ces lignes bougent. Elles se meuvent. Elles s’agitent. Elles voyagent. Elles frétillent. Parfois, elles tremblent, elles frémissent. Elles vont et viennent. Elles remuent. Elles se balancent. Elles se démènent. Elles ondulent, ondoyantes, sinueuses. Elles tanguent.
Telle
ligne jaillit, surgit, bondit. Elle est un élan, une pulsion, une tension. Elle
choisit, parfois, un tournant imprévu. Elle dévie de son chemin. Elle erre.
Elle vagabonde. Elle flâne. Elle s’égare et se retrouve. Elle traîne, puis
accélère. La ligne fugitive chavire ; elle vacille, elle oscille, elle
flotte.
Les figures équivoques envahissent une surface ; elles l’occupent.
Tu te souviens alors des techniques excentriques de Victor Hugo. A l’encre, Hugo mêle du café noir; il vieillit et colore la tonalité. Il se sert de plumes faussées qui crachent, d’allumettes cassées. Il utiliserait la suie, des mixtures bizarres. Avec ses insuffisances volontaires, avec son refus de toute grammaire graphique, Hugo choisit ses caprices, sa propre barbarie. Il est un expérimentateur. Il plie. Il découpe. Il colle. Il fixe des empreintes. Il réinterprète des taches d’encre et précise de nouvelles figures, des caricatures.
Comme
Victor Hugo, Jean-Christophe Philippi invente des mirages, des illuminations,
des zones déconcertantes, des régions indéfinies. Il explore.
Les papiers seraient des surfaces de production, de génération, de prolifération. Jean-Christophe Philippi obéit, en quelque sorte, au dessin qui a sa propre logique, ses rythmes. Le dessinateur est amené à s’étonner, à se retrouver. Il y aurait une genèse passive des œuvres créées, des formes qui se manifestent. Il y aurait aussi un cousinage de Jean-Christophe Philippi et d’Henri Michaux.
Les dessins de Jean-Christophe Philippi sont denses,
touffus, saturés, parfois impénétrables. Ils évoquent les enfers, l’apocalypse,
les tentations de Saint-Antoine, le jugement dernier, les métamorphoses, les
damnations, les sacrifices (1).
Tel dessin de Jean-Christophe Philippi est un jardin insolite où poussent les fleurs sauvages, où circulent les fauves. S’y trouvent les temps mêlés et les espaces disparates. Tu te perds dans un labyrinthe et tu souris.
Satan
est l’adversaire, l’accusateur, l’autre redoutable, l’ennemi tenace. Tel le
lion rugissant, il cherche qui dévorer.
Démone fatale, Lilith séduit et se venge…
Passent des légions de formes équivoques. Elles tourbillonnent. Ce serait un cyclone, un maelstrom, un vertige.
Les figures se superposent, se chevauchent, se recouvrent, se voilent et se dévoilent, s’ensevelissent, et renaissent, se masquent et se démasquent, s’enveloppent et se développent. Des corps deviennent visibles par des transparences, par des métamorphoses. Les crânes et les visages se déplacent et rayonnent.
Sur les dessins de Jean-Christophe Philippi, la force de l’incertain s’entrevoit."
LE BLOG DE JEAN-CHRISTOPHE PHILIPPI
SUR ARTESSENTIEL
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Les notes du texte de Gilbert Lascault :
exceptionnel avec quelques visuels d'hier et d'aujourd'hui ....
" Des
lignes sont serrées" un texte écrit par Gilbert Lascault en 2012 :
Ces lignes bougent. Elles se meuvent. Elles s’agitent. Elles voyagent. Elles frétillent. Parfois, elles tremblent, elles frémissent. Elles vont et viennent. Elles remuent. Elles se balancent. Elles se démènent. Elles ondulent, ondoyantes, sinueuses. Elles tanguent.
Les figures équivoques envahissent une surface ; elles l’occupent.
Les
supports variés, les taches.
Jean-Christophe Philippi peint et dessine sur les cartons de
récupération, sur le papier recyclé, sur les papiers d’emballage et aussi sur
des supports plus traditionnels, sur le papier blanc.
Parfois,
un papier est taché avec du café, avec du goudron, avec des encres.
Jean-Christophe Philippi serait peut-être un arrière-petit neveu de Victor Hugo
qui peint très souvent et crée des rêves d’encre, des « choses »
tourmentées et monstrueuses.Tu te souviens alors des techniques excentriques de Victor Hugo. A l’encre, Hugo mêle du café noir; il vieillit et colore la tonalité. Il se sert de plumes faussées qui crachent, d’allumettes cassées. Il utiliserait la suie, des mixtures bizarres. Avec ses insuffisances volontaires, avec son refus de toute grammaire graphique, Hugo choisit ses caprices, sa propre barbarie. Il est un expérimentateur. Il plie. Il découpe. Il colle. Il fixe des empreintes. Il réinterprète des taches d’encre et précise de nouvelles figures, des caricatures.
Les papiers seraient des surfaces de production, de génération, de prolifération. Jean-Christophe Philippi obéit, en quelque sorte, au dessin qui a sa propre logique, ses rythmes. Le dessinateur est amené à s’étonner, à se retrouver. Il y aurait une genèse passive des œuvres créées, des formes qui se manifestent. Il y aurait aussi un cousinage de Jean-Christophe Philippi et d’Henri Michaux.
Le
jardin aux sentiers qui bifurquent.
Jorge Luis Borges écrit un récit qui s’intitule en 1941
Le jardin aux sentiers qui bifurquent (2). Dans la très ancienne Chine, un
gouverneur de province imagine à la fois un roman complexe et un jardin
étrange. Ce gouverneur ne croyait pas à un temps uniforme, absolu. Il croyait à
des séries infinies de temps, à un réseau croissant et vertigineux de temps
divergents, convergents, et parallèles. Cette trame de temps qui s’approchent,
bifurquent, se coupent ou s’ignorent pendant des siècles, embrasse toutes les
possibilités. »
Tel dessin de Jean-Christophe Philippi est un jardin insolite où poussent les fleurs sauvages, où circulent les fauves. S’y trouvent les temps mêlés et les espaces disparates. Tu te perds dans un labyrinthe et tu souris.
Les
démons, les damnés.
Bien des dessins de Jean-Christophe Philippi proposent des
scènes de l’enfer, la proximité des démons, des diablesses, des damnés, des
bêtes, leurs alliances. Il ne s’y trouve nul instrument de torture, nulle
flamme, nulle eau glacée. Se voient les cornes, les griffes, les dents qui
grincent et qui mordent, les langues, les yeux cruels. Bien plus de 666 diables
se multiplient. Six cent soixante-six millions de tentateurs attaquent. La
Géhenne est une fosse des
profondeurs. La gueule dévorante
de l’abîme engloutit les pécheurs.
Démone fatale, Lilith séduit et se venge…
De très jeunes démons, des diablotins et des diablotines
surveillent les colonnes des damnés…Dans l’enfer, le Léviathan et Béhémoth
soupirent ; ils lèchent les pieds de Satan…
Le carnaval des animaux et des monstres.
Tu
écoutes souvent Le Carnaval des animaux que le compositeur Camille
Saint-Saëns crée en 1886. Et tu regardes la mascarade des bêtes et des monstres
que Jean-Christophe Philippi représente. Surviennent des rhinocéros, des
éléphants, des aigles, des hiboux, des paons, des chevaux, des tortues, des
lézards, des mouches, des béliers, des lions, des perroquets, des quadrupèdes
flous, des oiseaux vagues, des centaures, des minotaures, Méduse, le Léviathan
et d’autres êtres hybrides. La farandole des animaux se déroule. Ils sautent,
ils se trémoussent, ils gigotent, ils valsent,. Tu crois entendre leurs cris.
Ils rugissent, ils barrissent ; ils bêlent ; ils brament : ils
chuintent ; ils criaillent ; ils glatissent ; ils
grognent ; ils sifflent ; ils mugissent ; ils râlent ; ils
hululent.
Le
grouillement.
Jean-Christophe Philippi suggère alors des lieux perplexes et ambigus.
Des formes instables grouillent. Elles pullulent. Elles prolifèrent. Elles
fourmillent. Elles s’agitent. Elles circulent. Elles communiquent. Elles
s’attirent. Elles aguichent. Elles séduisent. Elles luttent. Elles se
collettent. Elles joutent. Elles se heurtent. Elles s’agglutinent. Elles se
collent. Elles s’accrochent. Elles s’agrippent.
Passent des légions de formes équivoques. Elles tourbillonnent. Ce serait un cyclone, un maelstrom, un vertige.
Les figures se superposent, se chevauchent, se recouvrent, se voilent et se dévoilent, s’ensevelissent, et renaissent, se masquent et se démasquent, s’enveloppent et se développent. Des corps deviennent visibles par des transparences, par des métamorphoses. Les crânes et les visages se déplacent et rayonnent.
Des fantômes te hantent.
Sur les dessins de Jean-Christophe Philippi, la force de l’incertain s’entrevoit."
" Il
commence à exposer dès l’âge de 15 ans dans des galeries de Strasbourg
et de Colmar, notamment la galerie Jade qui le présentera à Bâle et à
Paris. A partir de l’âge de 20 ans il expose régulièrement en France et à
l’étranger dans des expositions de groupe en Allemagne, en Suisse et à
Paris.
Parallèlement à son activité artistique, il mène des études de lettres qui le conduiront à l’enseignement du français. Il se passionne pour la littérature du Moyen-âge et de la Renaissance et étudie l’œuvre de Montaigne.
Jean-Christophe Philippi dessine et peint avec passion sous tout type de supports, il pratique aussi bien la peinture acrylique que l’huile, le pastel gras et le crayon, la gouache et l’encre de Chine. Il préfère utiliser des supports de récupération et fabrique avec du papier mâché de grands supports pour ses peintures.
Ses dessins sont non prémédités, produits comme dans un rêve éveillé à l’instar des dessins automatiques. Y surgit tout un univers fantastique et fortement chargé de symboles. Très discret et ne cherchant pas à exposer, c’est sur l’insistance d’amis qu’il se décidera à montrer à nouveau son travail.
Son travail est présent dans différents musées liés à l’Art Brut, comme :
- Le musée de la Création Franche
- La Fabuloserie
- Le musée des Arts Buissonniers
- Le musée Anatole Jakovsky "
Parallèlement à son activité artistique, il mène des études de lettres qui le conduiront à l’enseignement du français. Il se passionne pour la littérature du Moyen-âge et de la Renaissance et étudie l’œuvre de Montaigne.
Jean-Christophe Philippi dessine et peint avec passion sous tout type de supports, il pratique aussi bien la peinture acrylique que l’huile, le pastel gras et le crayon, la gouache et l’encre de Chine. Il préfère utiliser des supports de récupération et fabrique avec du papier mâché de grands supports pour ses peintures.
Ses dessins sont non prémédités, produits comme dans un rêve éveillé à l’instar des dessins automatiques. Y surgit tout un univers fantastique et fortement chargé de symboles. Très discret et ne cherchant pas à exposer, c’est sur l’insistance d’amis qu’il se décidera à montrer à nouveau son travail.
Son travail est présent dans différents musées liés à l’Art Brut, comme :
- Le musée de la Création Franche
- La Fabuloserie
- Le musée des Arts Buissonniers
- Le musée Anatole Jakovsky "
LE BLOG DE JEAN-CHRISTOPHE PHILIPPI
SUR ARTESSENTIEL
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Les notes du texte de Gilbert Lascault :
1. J.C Philippi aime lire
souvent Dante, Virgile, Le Paradis perdu (1667) de Milton. Le mariage du ciel et de
l’enfer
(1790)de William Blake, Baudelaire, La tentation de saint Antoine
(1849-1874) de Gustave Flaubert, Hugo, Henri Michaux, Antonin Artaud, Beckett…La
Bible, le livre des morts (v.1580 av. J.C) d’un anonyme égyptien, des
mythes dispersés, des livres de magie le passionnent. Les œuvres de Bosch, de
Breughel, de Jacques Callot, de Goya, les sculptures de la cathédrale de
Strasbourg le fascinent. Il est né en 1963 à côté de la cathédrale de
Strasbourg.
2. Borges, Œuvres complètes,
Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, t. I, 1993, p.499-508,1583. Surtout
p.507-508.
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