Hervé Lorant est aujourd’hui un des derniers artisans bretons perpétuant la tradition séculaire des cuillères de noces en bois sculpté.
Chaque visite chez lui, chaque nouvelle acquisition est un moment privilégié où la passion, le talent et le travail dominent.
Longue vie à ses créations sans cesse renouvelées où technique, originalité et fantaisie se mêlent !
"Les écrits ciblent la cuillère de mariage en bois ouvragé dans la Cornouaille et le pays vannetais. Pourtant, cette tradition semble s’être étendue un peu plus loin dans toute la Bretagne occidentale. Un écrit de Charles Chassé (“Fanch Lagadec, tambour de la République”) décrit une noce en 1802 à Gouesnou (29) : « Puis vint la semaine des invitations au banquet, invitations que, pour montrer l’étendue de ses relations, on ne craignit pas d’étendre très largement à des familles entières. Ce n’était guère là d’ailleurs qu’une avance de fonds car les cadeaux fournis par les invités qui apportaient aussi leurs couteaux et leurs cuillers pliantes en bois sculpté compensaient presque toujours la dépense de si copieuses agapes. » Il est vrai qu’il était alors difficile de fournir des couverts pour deux à trois jours de réjouissance rassemblant jusqu’à 2 100 convives
Cuillère de noce
Jusqu’au début du XXe siècle, la cuillère en buis ou en pommier prédominait dans le milieu rural. La fourchette n’est apparue qu’avant la Guerre de 14-18 dans les campagnes. Le bois a peu à peu été délaissé au profit de l’aluminium, plus facile à laver et inusable, malgré le goût aigre qu’il laissait sur les laitages. Il y avait les couverts de tous les jours et ceux « du dimanche ». Le jour de noces était un grand jour. Tout comme on ressortait ses plus belles broderies, chacun apportait sa plus belle cuillère, et pour les plus riches ou les plus habiles, il s’agissait d’un couvert sculpté.
Faire revivre une tradition
Hervé Lorant préserve cette tradition. Autodidacte, il s’est lancé dans le travail du bois après un début de carrière dans la téléphonie. Un rêve d’enfant, contrarié par une orientation forcée, qui est devenu réalité depuis une dizaine d’années. Ce qu’il aime le plus, c’est travailler sur les motifs et les traditions anciennes. « Le bois, c’est comme une alchimie, décrit-il. On peut sortir d’un tronc ordinaire une forme qu’on a en tête. Et ce travail n’a pas de fin, on s’améliore à chaque pièce. J’aime élever le niveau de complexité technique et ornemental à chaque fois. »
Taillées à l’origine dans du buis, les cuillères sont aujourd’hui taillées dans du bois local : pommier, if ou houx, « des bois durs, faciles à sculpter et présentant des beaux veinages. » Après tronçonnage, les branches sont débitées à la scie à ruban. Concentré, il manie ensuite avec dextérité la gouge, le fermoir, le burin ou le racloir pour ciseler la noble matière jusqu’à atteindre la finesse souhaitée. Le travail se termine par un ponçage et l’application d’une cire.
Une cuillère pliable, particularité bretonne
Appelées dans le pays bigouden les « loa an dud nevez », cuillères des jeunes mariés ou plus couramment « loa eured », cuillères de noces, ces couverts sculptés et pliants n’étaient cependant pas nombreux. Il en reste aujourd’hui peu de traces. Destinés à être transportés sur les lieux de fête, leur côté pliable leur permettait d’être glissés aisément dans la poche tout en protégeant la pointe de cuillère, qui cassait facilement. De plus, la forme complexe attribuait encore plus de valeur à cet objet d’apparat. Les plus belles pièces étaient incrustées d’étain ou de cire de couleur. Quant aux motifs, ils étaient d’une grande diversité : figures géométriques, fleurs, cœurs, rouelles solaires, ostensoirs, fleurs de lys, montrant ainsi les goûts et les idées des propriétaires, dont le nom ou les initiales étaient souvent gravés.
À chacun sa cuillère
Après
la noce, la cuillère de mariage était exposée sur un mur de la maison
et ressortait à chaque grande occasion. Les cuillères d’usage courant,
quant à elles, étant rangées dans le « pararailher », porte-cuillères
posé sur la table ou suspendu au-dessus de la table des ménages plus
aisés. Après le repas, chacun léchait bien son couvert ou l’essuyait sur
le coude avant de l’y ranger. Du valet de ferme au journalier, durant
les moissons, chacun possédait sa cuillère. Si un ouvrier agricole la
plaçait dans sa poche au lieu de la poser dans ce range-couvert à
l’ancienne, tout le monde comprenait qu’il ne reviendrait pas le
lendemain… Un geste symbolique qui évitait tout langage verbal."
HERVE LORANT ET LES GRIGRIS DE SOPHIE
LES EXPLICATIONS SUR LE PAYSAN BRETON
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Le cottage
29550 Plomodiern
Pour Michel bien sûr ....
Merci Hervé et Sophie pour cette rencontre en novembre dernier ! Un moment suspendu dans l'atelier d'Hervé Lorant !
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