vendredi 18 novembre 2011

ANDRE GOURLET A RIEC SUR BELON



ANDRE GOURLET faisait son jardin lorsque je suis arrivée chez lui. Pour un homme de 84 ans (il est né en 1927) c’est déjà bon signe ! Il a interrompu sans hésiter son activité pour me faire visiter son atelier et sa pièce d’exposition.


Dans celle-ci des sculptures en bois (un magnifique Saint Christophe trône sur l’établi), au mur un tableau plein de sensibilité réalisé par l’artiste en 1981, un dessin plus récent d’il y a 2 ou 3 ans, plus grand représentant la ferme de ses parents et les personnages de son enfance. Dans cette pièce aussi un immense totem réalisé à la suite d’un épouvantable cauchemar où ANDRE GOURLET tombé au creux d’un tronc d’arbre et aspiré par celui-ci fut sauvé par un blaireau, un hérisson, et d’autres animaux de la forêt.

Je ne suis pas sure que cette impressionnante réalisation ait réussi à apaiser l’artiste, je suis sensible à ce monde nocturne qui envahit parfois la vie d’un artiste (Bernard Roux évoquait lui aussi ce besoin de mettre en forme les images de la nuit).

Dans cette pièce aussi des lits clos et un buffet réalisé par ANDRE GOURLET à l’époque où il était menuisier.

Le métier de menuisier il l’a appris et exercé en famille (son père était lui aussi menuisier) réalisant beaucoup de meubles sculptés ainsi que des figures religieuses ou des personnages bretons. Il n’avait que 12 ans lorsqu’il a fabriqué son premier objet ,un cadre en bois pour sa photo de première communion.

Dans l’atelier, des sculptures très nombreuses, principalement des saints mais aussi et surtout une sculpture de métal, de grillage et de ciment à peine commencée.

A 84 ans ANDRE GOURLET crée toujours !

Pour son homme –lion il a fait un croquis grandeur nature sur une des portes de l’atelier et des travaux de recherche dans différents dictionnaires.

Je viens de téléphoner à ANDRE GOURLET et j'apprends que cette sculpture est en fait un diable. C’est Satan, gueule ouverte et menaçant. Les mains seront réalisées ultérieurement car l'artiste  s’est aperçu qu’il ne pourrait pas sortir cette pièce de son atelier. A l’extérieur donc il rajoutera aussi une lance d’un côté et une faucille de l’autre .Le socle est déjà préparé , il trouvera place prés de l’arbre de la cohabitation.

Avec le temps les meubles et les sculptures ont rencontré un moindre succès. ANDRE GOURLET s’attriste de ce désintérêt pour les objets religieux et pour ces ventes qui ne se font plus. A la retraite il a donc laissé de plus en plus de place à son imaginaire peuplant peu à peu son terrain d’un bestiaire fantastique.

Il a commencé par un indien de presque 3 mètres   en chêne mais peu à peu à cause des intempéries celui-ci a pourri et ANDRE GOURLET a choisi le ciment pour sa résistance à l’extérieur.

J’avais traversé rapidement le jardin, nous sommes donc retournés à la rencontre de l’indien, des deux singes, des deux bretons, de Don Quichotte et de Sancho , du Misérable (un homme penché, moins naïf, plus douloureux et plus expressif que les autres sculptures ) et du vaste dragon surmonté d’un elfe « prêt à décoller pour l’espace intersidéral » !
 Lorsque je lui demande si cette réalisation est venue à la suite de la lecture d’un livre fantastique il me répond qu’il ne lit pas (Il cite en revanche Cervantés pour Don Quichotte) et qu’il ne regarde pas de films fantastiques.

« C’est l’inspiration qui le veut ! » se plaît- il à dire, lorsqu’il commence une œuvre il ne sait absolument pas comment celle-ci va évoluer , ainsi l’aigle et le hibou sur la queue du dragon n’étaient pas prévus dans le projet initial . « Le dragon a 4 yeux, 2 radars pour se diriger dans l’espace, les animaux sont tous ailés avec des antennes ! »

Il m’explique la difficulté à installer les sculptures de ciment, problème lié au poids et à la taille des éléments présentés. Ainsi un tractopelle a été nécessaire pour déplacer le dragon et les pattes ont été ajoutées après coup !

Il regarde son travail avec émotion et émerveillement aussi. Étonné presque que de telles œuvres soient sorties de ses mains : « Je me demande comment j’ai pu faire ça » est une phrase qu’il prononcera plusieurs fois .

« J’ai besoin de faire des choses, il le faut pour faire passer mon temps » ainsi s’écoule la vie d’ANDRE GOURLET … « Je vais faire mes courses en vélo au bourg, je sculpte, je travaille au potager. Je travaille tous les jours, sauf le mercredi ! ». Le mercredi en effet il prend sa voiture et va à Lorient,  dans la zone industrielle, acheter du matériel de la colle, du ciment pour les réalisations extérieures.

Bien qu’il ne vende pas beaucoup, l’artiste continue ses sculptures en bois et son travail sur les 12 apôtres et les 4 évangélistes. Il fait trop froid l’hiver pour travailler dans l’atelier non chauffé. Il s’installe donc dans la pièce d’exposition.

Celui que les habitants appellent « le Facteur Cheval riécois » est heureux d’être « passé à la
télévision », heureux d’apparaitre dans le livre de Bruno Montpied « Éloge des jardins anarchiques » et de dépasser le cadre de la Bretagne. Il se réjouit à l’idée d’être connu ailleurs, plus loin, dans la France entière. Il regrette que les passants s’arrêtent au portail. Un panneau incite le visiteur à pénétrer dans le jardin alors n’hésitez pas !

Je crois qu’ANDRE GOURLET a du bonheur à montrer ses créations et à expliquer sa démarche. Vous lui ferez plaisir en poussant la porte de son atelier !

















ANDRE GOURLET
19 rue Mélanie Rouat
29340 Ric sur Belon

2 commentaires:

  1. « Il regarde son travail avec émotion et émerveillement aussi. Étonné presque que de telles œuvres soient sorties de ses mains : « Je me demande comment j’ai pu faire ça » est une phrase qu’il prononcera plusieurs fois. »
    - Voilà qui signale l’artiste, mieux même que toute examen de son œuvre : c’est exactement ce que dit Alain (dans le _Système des Beaux-Arts_, 1, 7).
    Ici, Alain parle de l’artiste et de son œuvre : « l'idée lui vient à mesure qu'il fait ; il serait même rigoureux de dire que l'idée lui vient ensuite, comme au spectateur, et qu'il est spectateur aussi de son œuvre en train de naître. Et c'est là le propre de l'artiste. Il faut que le génie ait la grâce de la nature et s'étonne lui-même.
    (Voir le reste du texte ici : http://philia.online.fr/txt/alai_011.php)

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  2. j'ai commandé le livre de montpied..
    en attendant le printemps et les jardins à visiter!

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