mercredi 19 juin 2013

LUCIEN FAVREAU ET SA BOHEME DANS LE SUD DE LA CHARENTE

Été 2010 Apolline et moi visitons, après avoir pris rendez-vous, LA BOHÈME DE LUCIEN FAVREAU, un lieu rare, préservé du grand public car un peu loin de tout mais parfaitement entretenu par la fille et le gendre de l'artiste ....

A DÉCOUVRIR SANS HÉSITATION ...


Etonnant Lucien Favreau


"Dans le sud de la Charente, La Bohème est un curieux jardin où se mêlent peintures, statues en béton et constructions en pierre. La maison est de la même trempe.

Hauterives (Drôme) a son Palais du Facteur Cheval où se pressent des milliers de visiteurs chaque année et Yviers a La Bohème de Lucien Favreau ornée de statues et peintures. Seuls quelques cars s'y arrêtent chaque saison. Cette maison n'est indiquée que dans peu de guides touristiques, mais ne laisse pas indifférent.

Un peu perdus dans la campagne sud-charentaise, la maison et son jardin de sculptures figurent parmi les chefs-d'œuvre de l'art brut . Impossible de rater la maison de l'ancien compagnon plâtrier Lucien Favreau (1912-1990).
C'est après la mort de son fidèle compagnon Zappy en 1963 que Lucien Favreau s'est lancé dans sa construction de statues en pagaille dans son jardin. Jardin qui, une fois plein de ces créatures de béton et de plâtres, s'est délocalisé de l'autre côté de la rue. Là, un cimetière de statues plus ou moins naïves regarde les rares automobilistes médusés passant aux alentours.
Pendant vingt-trois ans, le Charentais a créé un univers digne des plus belles œuvres d'art brut. Ça a commencé par une tombe en la mémoire de son fidèle épagneul et ça aurait dû terminer par un portrait de famille sur la façade de la maison. Mais Lucien Favreau était atteint de la gale du ciment, une maladie des maçons.
À coups de truelle et de spatule, mais pas de pinceau, Lucien Favreau a rendu hommage à tout ce qu'il aimait ou détestait, à tous ceux qu'il admirait ou méprisait. Se côtoient Mireille Mathieu, Georges Brassens, le Général de Gaulle, sa petite-fille ou encore le cantonnier du village. Une main géante en béton avec un cœur à l'intérieur salue Coluche. La même année, 1986, Lucien Favreau rendait hommage à Dominique Rocheteau et à ses coéquipiers en pavant une des allées de son jardin « Hallée les verts ». Devant la maison, une vieille tante acariâtre a droit à sa statue tout comme un esclave fraîchement défait de ses chaînes.
« Je suis seul ce soir » Lucien Favreau a aussi créé des statues plus farfelues comme cette chèvre bottée ou une vache qui rit encerclée des trois points maçonniques. Piscou se charge d'accueillir à bras ouverts le visiteur. Charlot rappelle le passé de compagnon de Lucien Favreau qui allait de chemin en chemin. « Là, c'est un Jésus en bonne femme, désigne Léon, le mari de Mireille, la fille de l'artiste. Une fois, des bonnes-soeurs sont venues visiter la maison et n'ont absolument pas été choquées de voir ce drôle de Jésus. Elles ont dit ''Pourquoi pas ?'' »
Dans le jardin, au-dessus de la fenêtre de sa chambre, Lucien Favreau a voulu rendre hommage au facteur Cheval : « Mon ami, mon chien, mon maître Cheval » et a peint le portrait de l'artiste drômois. « Nous lui avions offert un livre sur le facteur Cheval, c'est comme ça qu'il l'a découvert », apprend Léon. Sous l'autre fenêtre, un explicite : « Je suis seul ce soir. »
Sur toute la façade, des peintures directement teintées dans la masse qui une fois mouillée avec le tuyau d'arrosage de Léon révèlent de surprenantes couleurs vives refusant les usages du temps.

Difficile d'en savoir beaucoup sur la vie et les convictions de Lucien Favreau. Ses évocations de la guerre sont évidentes. La peinture dans la chambre représentant Mireille Mathieu écrasant de son pied Hitler ou la fresque rendant hommage aux victimes de Treblinka en sont autant de témoignages. « On ne savait pas s'il a aidé des juifs pendant la guerre, mais les évocations de la guerre sont nombreuses », témoigne Léon. Sur la façade un explicite « faites l'amour, pas la
 guerre », ou encore, son père tombé en Lorraine pendant la Grande Guerre allongé sur une tombe gravée « Verdun ».
Le clou de la visite est probablement « La Vache qui pisse ». Léon prend un malin plaisir à ouvrir le robinet et à raconter maintes anecdotes. Jacques Martin y aurait bu du pastis, un groupe de touristes du rosé…
La visite de La Bohème ne serait rien sans la visite de la maison. De nombreuses peintures plus ou moins gaies habillent les murs. Les portraits de Luis Mariano ou Goya côtoient ceux de Hitler en chat ou de la Joconde portant Zappy dans ses bras. La chambre de Lucien Favreau vaut largement le détour. Le visiteur en reste souvent interloqué. Une pieuvre géante a l'œil sur ce qu'il se passe dans le lit. Sa paire d'yeux était d'ailleurs accessible du grenier. Elle a été bouchée depuis.
Ce travail gigantesque, œuvre de toute une vie, est méconnu du grand public, mais bel et bien entretenu par les héritiers de Lucien Favreau, sa fille et son mari. Ce sont eux qui se chargent de faire visiter le jardin et la maison qu'ils habitent depuis le décès de l'artiste."




























(Les 3 dernières photos ont été prises par Apolline Lepetit)


LE TEXTE D'ISABELLE LOUVIER

LUCIEN FAVREAU ET LES GRIGRIS DE SOPHIE 

(cliquer sur les liens)

La Bohème,
Hameau de Lavaure, 
16210 Yviers, 
tél. 05 45 98 09 49
Visite sur rendez-vous.



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