Le remarquable travail de GEHA tient une place importante dans l'exposition de Carquefou
" L'ART POSTÉ ".
J'ai eu la chance de recevoir quelques enveloppes de sa composition et je sais le bonheur que procure leur arrivée.
L'artiste a répondu positivement à ma demande d'écriture et j'ai la joie de vous présenter aujourd'hui un texte écrit spécialement pour les Grigris.
Voici donc les souvenirs timbrés de GEHA !
" L'ART POSTÉ ".
J'ai eu la chance de recevoir quelques enveloppes de sa composition et je sais le bonheur que procure leur arrivée.
L'artiste a répondu positivement à ma demande d'écriture et j'ai la joie de vous présenter aujourd'hui un texte écrit spécialement pour les Grigris.
Voici donc les souvenirs timbrés de GEHA !
De mes souvenirs
timbrés
"Le virus de l’art
postal m’a été inoculé, en 1983, par un inconnu du Var qui m’a
invitée, via une lettre de chaîne, à envoyer une création
personnelle. Je lui ai retourné une minuscule eau-forte sous
enveloppe sage et ai reçu, en réponse, une étonnante carte postale
de sa fabrication. Il m’ouvrait alors une porte sur un monde
insoupçonné où les créateurs de tous genres, artistes confirmés
ou inspirés du dimanche, se rencontraient par l’intermédiaire de
La Poste. Pierre Marquer m’a recommandé les premières personnes
intéressantes à contacter dont un Allemand qui, à son tour, m’a
fourni une liste d’une quarantaine d’adresses de son réseau. Je
les ai toutes abordées !
Commençait alors un
échange frénétique avec ces adeptes des créations hors les normes
postales qui me faisait surveiller notre boîte à lettres le cœur
battant. Je découvrais la France du courrier exotique. Mais je
recevais aussi des surprises du monde entier, par exemple les
cassettes d’un trompettiste californien et les cartes en papier
mâché d’un autre Américain. Un Japonais, collecteur de tampons
d’artiste, envoyait de grandes feuilles composées tandis qu’un
Australien me révélait ses poèmes. Les artistes des pays de l’Est
proposaient des œuvres graphiques contre des nouvelles du monde
libre et un Néerlandais était fort généreux de ses aquarelles.
Tous avaient leur façon de faire et d’exploiter voir contourner le
formatage de la Poste.
Je me laissais stimuler
par tant de liberté mise en circuit et trouvais plein de matériaux
à récupérer, des pages de magazines pour commencer, puis des
gravures ou photos jusqu’aux collages ou pochoirs. Pendant cette
période j’ai développé la technique des petits papiers déchirés
qui rendait mes enveloppes décorées presque inimitables.
Si dans cette foule
certains correspondants lassaient vite, d’autres se révélaient de
véritables âmes sœurs. Je pense avec nostalgie à cet étudiant
anglais avec lequel je me mettais d’accord sur un sujet
appétissant, c’est-à-dire « eat art ». Afin de
communiquer plus aisément avec lui, je prenais des leçons
d’anglais. Durant presque dix ans se croisaient nos petits plats
fantaisistes, salades de collages, tartes aux pastels, boissons
chaudes ou froides aquarellées, etc. Quand David John Bell a fondé
une famille, notre connexion s’est arrêtée en douceur.
Un autre complice a su
conjuguer folie douce et paternité, Georges Bellocchi dit Giorgio
continue à coudre et à ficeler des créations étranges complétées
par des messages phonétiques toutes aussi mystérieuses. Sa fille
Lilas va avoir quinze ans.
Mais la
palme de la fidélité revient à Michel Julliard avec lequel je
corresponds depuis bientôt vingt-cinq ans. Nous nous sommes déjà
rencontrés plusieurs fois et c’est grâce à lui que le binôme
Albasser a découvert les beautés de l’Aveyron. Prix de beauté
également aux merveilleuses enveloppes peintes de Michel !
C’est lui, je crois me souvenir, qui m’a mise en contact avec
Marielle Conte, grande militante de l’art postal qu’elle fait
aussi pratiquer par ses élèves en arts plastiques. D’ailleurs,
j’ai été plusieurs fois mise à contribution pour « artpostaler »
avec ses classes.
Car on s’entraide
volontiers entre timbrés. Quand j’ai monté des expositions à La
Rochelle, je faisais appel aux fidèles de mon réseau pour m’envoyer
des sujets précis afin de pouvoir présenter des tableaux à thèmes.
Dans ce but, je postais également des objets à moi-même qui
devenaient du matériel de démonstration.
En retour, je ne
comptais pas mes envois, par exemple quand Fabienne Ruaut Lichet
préparait son exposition Cabinet de curiosités. Des choses
improbables devaient affronter le parcours postal. A des occasions
pareilles, j’aimais (et j’aime toujours) me présenter au guichet
d’un bureau de Poste pour observer les réactions des employés.
Certains restent impassibles ou lèvent juste un sourcil
désapprobateur puisque l’objet n’est pas réglementaire. Mais le
plus souvent, le guichetier est amusé ou il fait même des
compliments, et c’est une petite victoire sur la normalisation
galopante.
Pour en revenir à
Fabienne qui est maîtresse en école maternelle, elle a eu l’idée
géniale de m’engager à correspondre avec sa classe. Les petits
découvrent ainsi le dialogue à distance, l’utilité de l’écriture
et le grand plaisir que fait une lettre, lorsqu’on la prépare et
lorsqu’on reçoit la réponse.
Créer pour quelqu’un
et transmettre son plaisir de faire donne une grande joie intérieure.
Revoir mes envois pris en photos qui sont rangées dans des classeurs
(six après allègement) m’amuse à chaque fois. Souvent, ces idées
mises en conserve se métamorphosent en gravures qui, à leur tour,
peuvent se laisser transformer en enveloppes très personnalisées.
Il me paraît important et de plus en plus difficile de trouver les
timbres-poste (couleur et thème) assortis à mes créations . Les
petites valeurs faciales viennent d’être supprimées, elles me
servaient à construire des montages ou des cadres pour mes sujets.
Eni Looka n’a pas ce
genre de problèmes car il crée ses propres timbres-poste, avec
maestria et une paire de gros ciseaux pour découper les dents. Je
garde ses miniatures oblitérées précieusement. Parmi d’autres
CD-Rom, il a également édité un sur l’art postal en France
(L’Insoutenable légèreté des lettres, YMNA n°1, 1999) auquel
j’ai eu la chance de participer grâce à la présentation par
Philippe Charron. Ce dernier était un correspondant de proximité et
grand amateur d’envois drolatiques. Cette relation aussi s’est
endormie laissant la place à d’autres contacts plus ou moins
éphémères, pour le moment une vingtaine.
Humoristique,
esthétique, sociocritique ou poétique, l’art postal sous toutes
les formes repose dans mes boîtes rouges qui s’ouvrent trop
rarement pour montrer ces trésors, comme actuellement au Manoir des
Renaudières à Carquefou."
Merci Sophie, je suis très heureuse de cette publication que tu m'as suggérée à mettre sur pied. Au pied de la lettre! Ainsi, les Grigris stimuleront peut-être d'autres anticonformistes à poster librement et artistiquement.
RépondreSupprimerVive les timbrés et leurs supporters!
Amitiés de G. alias GEHA