vendredi 27 janvier 2023

 LES PAPIERS CALQUES GRAVÉS D'HÉLENE LAGNIEU ... MOI J'AIME























En 2014 Jean-Paul Gavard-Perret a écrit un très beau texte sur l'artiste lors d'une exposition à la galerie Béatrice Soulié  :

Hélène Lagnieu, Baroque viscéral

Les hybri­da­tions conséquentes

Dans les pein­tures, les encres, les col­lages d’Hélène Lagnieu le monde se mani­feste par le corps de la femme et ses ajouts ani­ma­liers. Les hybri­da­tions forment un nœud où s’efface tout décor. Dès lors elles donnent à ima­gi­ner un indé­fini sur­croît par la vertu de rap­pels et d’analogies. Le corps féminin-animal est rendu à une inno­cence sau­vage. Non que l’artiste ne réduise Eve à la bes­tia­lité. Mais irré­duc­tible à tout type de com­plai­sance, l’artiste crée de fait des por­traits subli­més “inver­sés”.
Ils éloignent autant du facile agré­ment que d’un éro­tisme quel­conque. Certes, la pro­messe d’un cer­tain plai­sir n’est pas obli­ga­toi­re­ment absente : elle fait par­tie de la masse totale de la vie au même titre que (par exemple) la mala­die évo­quée ici par cer­tains élé­ments tirés de gri­moires de méde­cine. Par­fois bour­sou­flé plus que semeur d’excitation, le corps jette le trouble par son déploie­ment d’économie ani­male. Mais tou­te­fois, c’est moins la femme que le voyeur qui tourne en bour­rique dans un tra­vail de résis­tance avé­rée face à la mala­die de l’idéalité comme au malaise des civilités.

L’œuvre séduit par son élé­gance dans la mesure où le lan­gage plas­tique en sa ména­ge­rie bâtarde touche à une vérité et un accès para­doxal au réel. Le contour d’un sein ou d’une hanche très vite coupé par des élé­ments volon­tai­re­ment para­sites accen­tue l’évidence que se joue ici — ani­mal aidant — une exten­sion du réel. Mi-femme mi-bête, l’image décon­te­nance d’autant que la nudité (pro­mise « beyond sex » aurait écrit Duchamp) est pous­sée loin de toute dis­trac­tion super­fé­ta­toire. La longue série de touches savantes et drôles est conduite jusqu’au point où de l’hybridation sur­git une unité par effet de méta­mor­phoses plus radi­cales que méta­pho­riques, fidèles à la réa­lité humaine la plus pro­fonde.
Le corps gras et géné­reux comme une terre fer­tile devient par­fois un simple déploie­ment d’une sou­plesse féline. L’animalité débar­rasse la vision de toute idée de mythe. Elle ramène à une sim­pli­cité char­nelle dou­lou­reuse comme jouis­sive. Hélène Lagnieu détord sans appa­rat mais avec beau­coup de doigté l’arc tracé par la déesse égyp­tienne qui fit jadis du fir­ma­ment tout entier le corps fémi­nin. Ramené à la bête, ce der­nier devient la réponse à une exi­gence irré­pres­sible et natu­relle. Dans sa com­bi­nai­son baroque et vis­cé­rale, l’être passe de l’état de fan­tôme méta­phy­sique à celui de chair pri­mi­tive du futur.


LE SITE D'HELENE LAGNIEU

SUR INSTAGRAM 

 UN BEAU TEXTE D'EMMANUELLE GRAND SUR SES DESSINS

 SUR PANDORTART

 SUR LE LITERRAIRE.COM

(cliquer)


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire