mardi 30 juillet 2019

LES POUPÉES DE SARA AUSTIN


La superbe interview de Sara Austin continue aujourd'hui sur les Grigris ....











Avez-vous l'impression que vous ferez des poupées toute votre vie ?

Si je continue à faire des poupées, elles devront être faites de matériaux différents, des choses trouvées, des choses recyclées. Je voudrais qu'elles soient en partie humaines, en partie animales. Je veux incorporer du dessin dans les figurines, en partie à plat, en partie en 3D. Je veux continuer à travailler dans des modes qui combinent dessin et couture. Mon travail sur les poupées était principalement relié à la question : Qu'est-ce qu'une poupée ? Je ne sais pas si j'ai fini de l'explorer ou non. Peut-être est-ce temps de poser la question, Qu'est-ce que n'est PAS une poupée ? La plupart des gens pensent que les poupées doivent être belles. Je ne suis pas d'accord avec cela, évidemment.
Une poupée est toujours une poupée, quelque soit son apparence, aussi longtemps qu'elle comporte les éléments d'une silhouette qui se connectent dans votre cerveau avec l'idée d'une poupée. Peu importe qu'elle soit laide, ordinaire ou incomplète, elle peut toujours être une poupée et peut toujours être aimée. Elles peuvent être des remplaçants de personnes. Comme pour les personnes, j'ai un lien plus fort avec une poupée qui est quelque peu déficiente, à qui il manque un morceau, qui est sale ou laide. Tout comme le foutoir peut être beau, une figurine foutue peut aussi être belle.
 

Avez -vous des projets ?

Je n'ai aucune idée de ce que je ferai après. Je fais des projets mais je ne sais jamais, avant de commencer à travailler, ce que je ferai. Les projets ne sont pas faits pour être suivis. Les projets sont faits pour avoir un point de départ. J'aime toujours faire des figurines, mais j'ai tant d'idées que je suivrai les idées qui sont les plus insistantes, celles qui m'appellent le plus fort, et qui me rendent la plus curieuse. J'aimerais revenir au travail d'installation. Cela pourrait être avec des figurines, je ne suis pas sûre. J'ai d'autres idées pour des formes plus abstraites, qui seraient des vaisseaux, en laine feutrée et crochetés, comme des tasses à café géantes qui ne servent à rien. Parfois il y a des figurines qui émergent des vaisseaux. Ceux-ci sont à divers stades de formation, certains hauts, d'autres courts et gros, toujours avec une forme qui se dissout vers le haut. On dirait qu'elle fond et perd son but d'origine pour devenir autre chose. Je pense que ces formes parlent du changement, ce qui est la seule constante dans la vie. Mais je ne peux pas connaitre la signification ou l'objectif de ce travail avant de le faire.

Parfois au cours de la réalisation, je comprends de quoi il pourrait s'agir. On dirait que mon inconscient s'exprime quand je travaille et ensuite je comprends ce qui se passe. En faisant ces formes distordues, exagérées, je me rappelle ma mère et sa porcelaine rococo pleine de courbes, de formes délicates hautement décoratives. Ces objets se sont imprimés dans ma mémoire et je peux encore les voir, merveilleuses formes délicates et fragiles. En faisant ces objets, j'ai voulu pousser les formes vers quelque chose d'extrême, d'original, les exagérer et les distordre, les rendre plus grandes et plus fortes, les amener vers une nouvelle sorte de vie. Quand les choses sont plus grandes, exagérées et distordues, nous les voyons de façons différentes et nous pensons de façons différentes. Un objet banal peut sembler très important quand il est fait de matériaux et de taille inhabituels. J'aime créer des questions dans mon travail et de l'étonnement chez le spectateur. Je veux les faire pendre du plafond, sortir des murs, reposer au sol de sorte que le spectateur puisse être avec eux, qu'il interagisse avec eux et soit confronté à eux. Je veux que cela soit une expérience, et pas seulement une promenade à travers une exposition.
Je veux que les gens s'assoient sur le sol avec ces formes, les touchent, se lèvent et se cognent dedans, sentent les textures, la rondeur, la douceur. Il y aura des mots cousus sur chacune d'elles. Des mots pour se rappeler, des mots importants. Des mots comme "pardon", "gratitude".
A force d'avoir une vie avec tant de gens et de situations qui ne sont pas normales et de devoir apprendre ce qui se passe, que faire, comment s'occuper de la personne et de la situation, j'ai constaté que le difficile et l'anormal créent chez moi le plus de changement et de croissance. C'est pourquoi je veux présenter un travail qui semble anormal, conflictuel et qui montre un monde avec beaucoup de questions sans réponses.
Je me souviens d'une chose que j'ai apprise quand j'étais enfant et qui a toujours été important pour mon travail.

Réconforte celui qui est perturbé et perturbe celui qui est à l'aise.



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SUR WORKPRESS

SARA AUSTIN ET LES GRIGRIS DE SOPHIE


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