Avril 2015 ... Le bonheur de retrouver Pierre Amourette chez lui, avec dans ses différents ateliers des Vierges somptueuses ...
Et pour accompagner mes photos aujourd'hui un texte de Nicole Crestou, céramiste elle aussi, publié dans le numéro 191 de la Revue de la céramique et du verre en 2013 :
Un grand merci Nicole pour ce texte ...
LE SITE DE PIERRE AMOURETTE
PIERRE AMOURETTE ET LES GRIGRIS DE SOPHIE
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Et pour accompagner mes photos aujourd'hui un texte de Nicole Crestou, céramiste elle aussi, publié dans le numéro 191 de la Revue de la céramique et du verre en 2013 :
"Pierre Amourette, un parcours atypique
construit sur d’heureux hasards
Il est rare de rencontrer un artiste
qui obtient ce que la plupart des sculpteurs souhaitent et attendent
parfois longtemps, à savoir, exposer dans une galerie, parisienne de
surcroît, et cela sans avoir commencé la moindre pièce, sans avoir
quasiment jamais réalisé de sculptures. C’est pourtant ce rêve
qui est arrivé à Pierre Amourette, sans qu’il ait lui-même
conscience du caractère exceptionnel de son histoire.
Instituteur à
Nogent-le-Rotrou, Pierre Amourette s’intéresse à l’art et y
initie ses élèves. En 1999, il leur propose une recherche inspirée
des œuvres de Jephan de Villers et prolonge l’aventure en les
emmenant jusque dans l’atelier du sculpteur en Belgique.
L’enthousiasme est tel tant de la part des enfants -qui réalisent
80 sculptures- que de celle du sculpteur, qu’une exposition est
organisée au musée de Nogent et dans la galerie de Béatrice
Soulié, à Paris. Celle-ci accompagne Jephan de Villiers chez Pierre
Amourette et découvre une statue qu’il avait réalisée 20 ans
auparavant pour marquer la fin des travaux de sa maison. Béatrice
Soulié lui propose alors une exposition personnelle qu’il ne prend
pas au sérieux. Un an plus tard, lors d’une naissance, il lui
offre une statue témoignage de la relation entre Jephan de Villiers,
les enfants et Béatrice. Elle renouvelle sa proposition. Cette fois,
il accepte. 15 statues sont montrées rue Génégaud et 15 sont
vendues. Ce fut un choc pour le nouvel artiste : « Je
ne m’attendais pas à cela, je n’y étais pas préparé car je
viens d’une famille qui fonctionne avec une autre forme de pensée :
lorsqu’un problème se pose, nous apprenons matériellement ce qui
est nécessaire pour le résoudre puis nous passons à autre chose.
Cette façon de vivre est bien éloignée de toute expression
personnelle et d’un questionnement artistique.»
Depuis les expositions s’enchaînent,
nombreuses, environ 17 l’an passé et génèrent des ventes :
1250 réalisations en 13 ans. « J’acceptais encore récemment
presque toutes les expositions : les plus reconnues comme la biennale
de Châteauroux cette année ou un petit salon local. Maintenant j’en
refuse certaines, notamment lorsqu’il faut subir les discours
inadaptés des politiques ou lorsque les organisateurs ne
reconnaissent pas à sa juste valeur le travail artistique. Au début,
lorsque les statues revenaient d’une exposition, je les cassais
systématiquement. Mais un jour, ma femme s’en est aperçue et m’a
incité à installer une salle d’exposition, ici, qui d’ailleurs
est partagée avec une autre céramiste. »
S’il prend du plaisir à créer,
Pierre Amourette est plus à la recherche du dialogue, du partage
avec le spectateur, de la réaction du collectionneur. Il a choisi de
vendre à petit prix, en province, car il travaille vite mais surtout
pour qu’un grand nombre d’œuvres circule : « Plus
je vends, plus je me partage. Ce qui m’intéresse, c’est que les
gens me parlent de leur vie avec la sculpture qu’ils ont choisie.
Que l’on puisse s’emparer de ce que j’ai fait et vivre avec, et
même en acheter plusieurs et commencer une collection, me semble
tout à fait magique. Il est fondamental que quelqu’un prenne du
temps pour discuter, c’est lui qui me fait un cadeau. Et quand ce
sont des artistes qui échangent ou acquièrent une pièce, le
plaisir est immense, comme lors d’une visite inopinée chez Danièle
Jacqui, qui m’en a gardé 4, 1 pour elle et 3 pour exposer à
Aubagne. J’allais porter des statues à Nice puis à St Sever mais
je n’en n’avais pas prévues suffisamment. »
Sans doute le style des visages naïfs,
les mains justes dégrossies, ou le parcours de Pierre Amourette ont
induit qu’il pouvait appartenir à la famille des artistes
singuliers. Ce réseau étant bien organisé, les expositions sont
nombreuses. Mais le style du céramiste déborde cette tendance
artistique. Les postures, les élégants plis des vêtements,
l’emploi de couleurs douces, sobres, les matières sont d’un
ordre plus classique et concourent avec les sujets à conférer aux
œuvres un statut d’art sacré. Car Pierre Amourette puise ses
sujets dans l’art religieux : les maternités, les piétas,
Saint-Georges terrassant le dragon ou d’autres légendes sont
maintes fois représentées. « Je travaille sur un imaginaire
commun avec plein d’entrées possibles. Mes statues trouvent leur
place aussi bien dans un musée d’art populaire que dans une
galerie d’art contemporain. Je travaille pour le plus grand nombre,
pour susciter une émotion. Les moments de grâce qui me sont
donnés par les amateurs me donnent envie de continuer.» Si nombres
de statues sont séduisantes, l’artiste n’est pas à la recherche
de la beauté. Les expressions des visages peuvent être violentes,
plus sorcières que fées. Les plus récentes femmes ont à la place
de leur ventre des morceaux d’ardoise des monts d’Arrée qui
augmentent de volume ou bouillonne pendant la cuisson. Et sans doute,
il n’est pas anodin que ce soit les entrailles qui explosent
pendant la cuisson, c’est delà que part cette création.
Si Pierre Amourette reste étonné que
des galeristes puissent prendre des risques financiers pour exposer
ses œuvres, il a compris le fonctionnement du marché de l’art. Il
a conscience que son aventure n’arrive pas à tous les créateurs
et mesure le bonheur d’être bien accueilli, que son œuvre soit
recherchée, bien exposée et appréciée. « La consécration
fut l’invitation de Chris de participer à une émission de radio
avec Béatrice Soulié. Ce fut un merveilleux moment car dans mon
enfance et encore à l’époque pour mes parents, la radio était
une institution sacrée, la voix de la vérité et des personnages
importants. J’en garde un souvenir intense car Chris était une
grande professionnelle et une belle personne. » Intégré dans
le milieu des galeries, il est devenu l’ami de peintres et de
sculpteurs. L’hiver dernier, il a participé à une résidence de
tailleur de pierre à Saint-Sever du Moustier.
Depuis qu’il est à la retraite
Pierre Amourette se consacre totalement à la céramique, construit
des fours, à gaz, à bois et en abandonne même l’entretien du
jardin. Pendant les 5 premières années, il n’a créé que des
maternités : des femmes couronnées avec un enfant dans les
bras. Devenu plus céramiste, il apprend à monter des jarres à la
corde, à estamper dans le plâtre, à trouver de nouveaux émaux de
haute température pour la porcelaine ou à utiliser des couleurs de
terre vernissée comme dans la tradition locale de Ligron… « Je
travaille avec l’argile comme avec les enfants, je propose et
construis en fonction des réponses. J’ai la sensation d’être un
enfant, je fais sans réfléchir. Je « balance » sur une
sorte de squelette, de base solide, et je compose de manière très
spontanée. Je façonne plusieurs pièces en parallèle, mais le
modelage d’une sculpture peut être terminée en une journée. La
terre papier a libéré mon façonnage. Après je regarde et juge.
Mais maintenant je travaille aussi à partir des réactions suscitées
par les statues. Cela crée des étincelles qui suggèrent de
nouvelles pièces. Cela rend aussi possible le fait de répondre à
une commande. Avant je me disais « tripoteur de terre »,
aujourd’hui je sais un peu mieux qui je suis. »
Un grand merci Nicole pour ce texte ...
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