Pour son ami François Schmidt et pour fêter le prix Jean-Louis Forain 2012 qui lui a été attribué pour "La cathédrale engloutie", Michel Bénard a écrit ce texte :
" Au regard du parcours
artistique et personnel de François Schmidt, il nous sera bien
difficile de trouver plus européen que lui, pour l’esprit de
notre Cénacle Européen, c’est presque un parcours sans faute.
Bien que ce ne soit pas
exactement vrai, car involontairement François Schmidt s’est
marginalisé, petite coquetterie malicieuse, car aucun prix de notre
Cénacle Européen ne correspondait à son travail, mais confronté à
une pareille qualité les membres du jury se refusèrent d’écarter
François Schmidt pour un simple détail statutaire, alors nous
avons décidé de créer cette année à titre exceptionnel un
nouveau prix. Après divers tâtonnements devant plusieurs noms de
graphistes et peintres possibles ce fût celui de Jean-Louis Forain
qui fût retenu. Situons-le rapidement. Artiste né à Reims en 1852
et mort à Paris en 1931. Il est hélas un peu oublié aujourd’hui,
mais en son temps il jouissait d’une grande renommée, excellent
peintre, ce fut aussi un remarquable dessinateur. Pour la petite
histoire des influences, son style personnel et incisif imprégna
beaucoup le jeune Picasso qui possédait un de ses livres illustrés.
Sans oublier les journaux « Le Gaulois » et « La
vie parisienne » auxquels Jean-Louis Forain collaborait que
Picasso pouvait lire. Certains de ses pastels orientèrent aussi
Picasso.
Ainsi ce nouveau prix qui
vient aujourd’hui couronner François Schmidt ne fait que
concrétiser la valeur artistique de notre lauréat.
Artiste, dessinateur,
illustrateur, conteur, auteur, François Schmidt a un parcours très
professionnel reconnu dans de nombreux pays.
Auteur de plus d’une
vingtaine d’ouvrages illustrés, il collabore et dessine pour FR3,
pour les éditions « L’Effervescence » où il est
l’une des pierres angulaires et dont il fût le fondateur.
Vivant et travaillant à
Reims il est aussi souvent sollicité par le monde du champagne. Ses
activités rattachées à la culture sont multiples, il y a quelques
années il a réalise des images géantes qui furent projetées sur
des édifices publics, monuments, cathédrales etc. Il conçoit
également des décors de théâtre, des jaquettes de disques, des
maquettes de livres, la liste serait encore longue mais sa modestie
pourrait en être affectée.
Coté expositions
personnelles ou collectives, nous ne les comptabilisons plus, France,
Paris, province, Allemagne, Belgique, Grèce, Portugal, Espagne,
Bénin, Guinée etc.etc.
Ainsi, comme je le
soulignais initialement, il est difficile de trouver plus européen
que François Schmidt qui nous dit : qu’« évoquer
l’Europe, c’est évoquer le sol où poussent nos racines. »
Chez lui l’Europe
commence avec son patronyme, Schmidt, qui résonne un peu comme un
vent parfumé des résines d’épicéas nous revenant de foret
noire.
Dans son adolescence il
connaîtra la RDA, qui n’est plus que le souvenir d'un lourd passé
historique. Ensuite épris des voyages il parcourra l’Europe, de
long en large, Europe de l’Est, centrale, du Sud, je vous
épargnerai la liste de tous les pays qu’il fixa sur ses carnets de
dessins et dont la poussière se colla aux semelles de ses souliers.
Simplement j’évoquerai
une importante exposition qu’il réalisa récemment en 2011 en
Grèce sur l’ile de Tinos dans les Cyclades, ces seuls noms
évoquent en nous tant de souvenirs et d’images mémorielles où il
a reçu un chaleureux accueil et remporta un immense succès. La
beauté, l’originalité et le raffinement de ses œuvres furent une
révélation pour un public grec et international amateur du vrai
métier de dessinateur et de travaux de qualité.
Précisément puisque le
dessin est ici l’axe central de l’œuvre de François Schmidt,
laissons-nous porter aux travers des méandres, des histoires, des
mystères, des touches d’humour, des interrogations ésotériques
contenus dans cette œuvre singulière, sans laquelle François
Schmidt ne serait pas parmi nous aujourd’hui.
Ce dernier, appartient à
cette catégorie d’artistes inclassables dont l’originalité et
la singularité m’attirent particulièrement, cette année
d’ailleurs avec Chantal Lanvin, Jean Zorko nous sommes comblés et
François Schmidt ne dénote pas du tout au contraire!
Pour être atypique, il
l’est, c’est le moins que nous puissions dire, là réside tout
l’intérêt de sa création, de son expression, de son imagination.
Afin de poursuivre une
œuvre authentique, il est absolument nécessaire de toujours
demeurer dans l’étonnement, dans l’émerveillement, de se
renouveler sans cesse. Il est indispensable de savoir encore s’égarer
dans son œuvre personnelle, sans carte, ni astrolabe, de la
parcourir comme un labyrinthe dans l’incertitude de l’issue.
François Schmidt est un
perfectionniste, d’une exigence avec lui-même à la limite de la
maniaquerie, de la névrose de l’absolu, ce qu’il reconnaît et
avoue lui-même.
« Je dessine
avec précision presque maniaque, m’imposant des règles aussi
absurdes qu’inutiles. Par exemple, je trace les choses qu’il y a
derrière les choses vraiment. Je m’use les yeux à additionner les
détails, collectionner les collections et y glisser ma petite
musique. Le fouillis c’est la vie, l’anecdote mène aux grandes
histoires. »
Le trait est de la plus
haute précision, insolite, inattendu, évoluant au fil de la pensée,
de la ligne innovante et de l’imaginaire spontané s’enchaînant
au fur et à mesure de l’évolution de l’œuvre. La construction
s’harmonise naturellement comme une ligne mélodique, sans réelle
élaboration préalable.
Le dessin se fait parfois
prémonitoire, visionnaire et sage, dénonçant à sa manière
l’inhumaine folie, la menace d’un péril programmé par notre
cupidité et aveuglement à nous vouloir supérieur en tout.
Afin de mieux prendre
conscience de l’intérêt et de l’indescriptible diversité de
cette œuvre, il suffit de prendre le temps, de ralentir un peu notre
rythme effréné, de détailler chaque élément, je serais tenté de
dire, de se donner la respiration nécessaire pour lire, oui j’ai
bien dit lire, comme on écrit ou lit une icône, un manuscrit ancien
de haut en bas ou de droite gauche pour rompre avec nos automatismes
occidentaux ! Absolument, car nous ne sommes pas loin ici de
l’iconographie fabuleuse, sacrée et profane à la fois. Oui nous
côtoyons ici une facette initiatique de l’œuvre de François
Schmidt.
Nous demeurons dans
l’esprit des premiers architectes, des bâtisseurs de cathédrales,
des artisans, des maîtres compagnons sculpteurs, verriers,
charpentiers, etc. Notre ami se fait alchimiste, concepteur de
labyrinthe, son trait est fouillé, appliqué, il foisonne de détails
époustouflants et intrigants, anachroniques parfois, d’une
extrême précision proche de l’obstination perfectionniste.
Il y a réellement chez
cet alchimiste graphiste, l’âme d’un perpétuel quêteur ou
révélateur « laïco-mystico-syncrétique, » où l’on
peut retrouver tous les courants de la pensée humaine et d’une
connaissance métissée, sorte de grand puzzle original à la sauce
François Schmidt.
Par fragments discrets,
par détails multiples l’histoire du monde Occident, Orient, est
confinée dans l’œuvre de notre créateur, qui est en fait une
sorte de parcours initiatique, constat ou témoignage d’une société
où le passé extrêmement proche est similaire du présent et où
l’espérance d’un futur plus lumineux demeure encore dans les
ténèbres de nos consciences.
Voici bien une œuvre
porteuse de la pensée universelle, mais où sans cesse nous sommes
confrontés à notre ignorance et aveuglement obtus !
Par ce don de dessinateur
qui lui fût insufflé, François Schmidt se fait relayeur, passeur
d’une connaissance, d’un savoir, il joue un rôle d’initiation
et de transmission, à nous dans l’observance de savoir en cueillir
les fruits.
Pour conclure je songe
ici au stylite de « La cathédrale engloutie »
s’adressant à son disciple en ces termes :
« …à toi de
préserver la paix et le calme retrouvés. La cathédrale t’y
aidera, car c’est la plus belle preuve du génie humain…
Il n’y a plus de
dieux ici ; y en a-t-il eût un jour ? Il n’y a que des
pierres humides. Mais aussi du rêve, de l’utopie et de l’amour,
tant que cette église restera plantée debout entre ciel et terre.
Tu en es maintenant le
gardien et après toi, des enfants te remplaceront. »
N’est-ce pas la plus
belle note d’espérance que nous puissions imaginer ?
Pour m’être imprégné
de cet incontournable ouvrage de François Schmidt, j’ai revisité
les huit siècles de la cathédrale différemment, avec un autre
regard, avec ce sentiment plus prononcé d’être au cœur du Livre
de pierre (ou de Pierre) de la connaissance universelle, bien loin
d’une quelconque dogmatique.
Ici le sens du sacré
nous restitue notre liberté de penser et nous transporte sur un
autre plan, non plus celui de l’homme objet de la création, mais
de l’homme dans sa fonction de créateur.
Pour notre ami, je pense
qu’être artiste, poète, c’est déjà revendiquer son besoin
d’amour, c’est respecter la vie et oser croire encore en l’Homme,
c’est tendre tout entier vers un devenir.
Alchimiste de la matière,
par son acte de création l’artiste peut métamorphoser la vie ! "
...ce message de François annonçant une nouvelle réjouissance :
"Je commence, malgré mon grand âge, une carrière internationale de Slameur Scientifique. Ni vous ni moi ne savons ce qu'est le "slam scientifique" mais nous allons apprendre ensemble !
Le soir du 29 mai prochain, à 20h 30 au café-bar "le Challenge", 152 rue St Marceaux, je vous parlerai de la sexualité des méduses !"
LE SITE DE FRANÇOIS SCHMIDT
LE SITE DE MICHEL BENARD
(cliquer sur les liens )
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire