Les Grigris de Sophie ce sont bien sûr des broches, des colliers et des sacs … mais c’est aussi un blog !

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Mais c’est aussi un blog ! Un blog dans lequel je parle de CEUX et de CE que j’aime …
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samedi 2 août 2014

LA PETITE FILLE QUI AIMAIT LES BONBONS DE MARIE-ODILE GUY





La petite fille qui aimait les bonbons

Devant la cheminée de la grande cuisine, le feu crépitait. Les enfants entouraient leur grand-père.
- Tu nous racontes une histoire ?
- L'histoire de Jeannot Lapin qui avait perdu sa maman, supplia une petite voix.
- Ah non, protesta sa sœur, c'est une histoire de bébé et on la connaît par cœur ! On veut une histoire de grand.
- Une histoire de grand ? En voilà une. Écoutez...

L'homme entra dans le parc. C'était une fin d'après-midi d'automne. Des poussettes chargées d'enfants venaient de franchir les grilles. Leurs joues étaient barbouillées du chocolat de leur goûter. Quelques uns dormaient, d'autres pleurnichaient en réclamant leurs doudous.
On entendait encore au loin les cris des enfants venant de l'aire de jeux. Ceux-là n'allaient pas tarder à partir. Il ne resterait que très peu d'enfants, ceux qui habitaient le quartier. Ils attendraient la nuit tombée pour quitter le parc.
L'homme était grand et mince. Il portait une petite moustache noire qui lui donnait un air sévère. Ses yeux étaient très noirs sous des épais sourcils, noirs eux-aussi.
Il tenait à la main une mallette. Son imperméable était entrouvert car le temps était doux. A son cou pendait une écharpe rouge. Il marchait sans se presser, jetant des coups d’œil à droite, à gauche, semblant chercher quelque chose...
Soudain, il s'arrêta. Il se mit à fixer quelque chose au bout de l'allée. Un léger sourire se dessina sur ses lèvres. « La voilà, murmura-t-il, qu'elle est belle... »

Le grand-père scruta son auditoire en roulant des yeux sous ses épais sourcils. Les petits regardèrent les plus grands avec inquiétude.

L'homme quitta l'allée et pénétra dans le sous-bois. Il avançait à couvert, à pas de loup, en faisant attention à ne pas faire craquer les feuilles mortes qui jonchaient le sol. Un écureuil perché sur une branche l'observait de ses petits yeux vifs. Lorsque l'homme s'arrêta derrière son arbre, il s'enfuit, effrayé.
A quelques mètres de là, une petite fille jouait à la corde à sauter. Elle se débrouillait bien pour une petite fille de cinq ans ! Schlink, schlink, faisait la corde en frappant les graviers de l'allée.
Sans doute sa mère, assise dans l'enclos des jeux, était-elle assurée de sa présence en entendant chanter la corde. Schlink, schlink...
« On dirait qu'elle m'attend, toute seule dans l'allée. La nuit ne va pas tarder à tomber. Il ne faut pas que je l'effraie... »
Alors, sans faire de bruit, il s'accroupit. Il ne vit pas son écharpe tomber lorsqu'il ouvrit sa mallette. Il en sortit...un paquet de bonbons.

« Ah non, Grand-Père, s'exclama l'aîné des petits-enfants, tu ne vas pas nous raconter l'histoire du monsieur qui attire les petites filles avec des bonbons ! Maintenant c'est sur Internet que ça se passe ! »
Le vieux monsieur lissa sa moustache et se mit à rire.
- Écoutez plutôt la suite.
- Dis, Grand-Père, ça fait pas peur ? chevrota une petite voix.

La petite fille stoppa sa corde à sauter. Elle avait entendu du bruit derrière l'arbre et reconnut tout de suite l'écharpe rouge.
« Papa, s'écria-t-elle en se précipitant. Elle courut, tenant encore sa corde qui bondissait derrière elle. L'homme ouvrit les bras. Elle se jeta sur lui. La corde comme un serpent s'enroula autour des chevilles de l'homme. Il trébucha et s'étala de tout son long. Sa tête heurta l'un des gros rochers qui bordaient l'allée. Le sachet de bonbons atterrit aux pieds de la petite fille. Elle le ramassa et vit alors le sang couler sur le rocher. Elle se mit à hurler « Maman ! »

Il y eut un silence. Les bûches se consumaient dans l'âtre qui se teignait de rouge.
Les questions jaillirent :
- Il est mort le monsieur ?
- Et la petite fille, c'est qui ?
- La petite fille, c'est votre maman. Et le monsieur, il n'est pas mort.
Il pencha en avant sa tête et dans la lueur rougeoyante du feu, tous virent en avant du crâne dégarni une cicatrice blafarde.



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