Et pour accompagner mes photos aujourd'hui le texte que Monique Chabaud a écrit pour la venue de MARC NUCERA au Musée Auguste Chabaud ...
Marc
Nucera
La force du travail.
La maitrise du
geste.
En
cette fin d’année 2016, le musée Auguste Chabaud, pour donner
suite à la belle rencontre avec le sculpteur Michel Pozetto et ses
figures sacrées, ouvre ses portes à un nouvel artiste de talent,
Marc Nucera, sculpteur dans l’âme, enclin lui aussi, à rendre
hommage au grand fauve, autour d’un dialogue sensible, avec la
présentation de ses œuvres monumentales d’une étonnante
modernité.
Marc
Nucera est sculpteur d’arbres. Son approche totalement instinctive
et intuitive mais d’une grande maitrise, est celle d’un « homme
-chaman ».
Empreint
de spiritualité, il possède le sens de la magie, et de ses mains
fait naître l’improbable, nous révélant des œuvres d’approche
totémique, figures de vénération, contemplatives et méditatives,
possédant certains pouvoirs. L’artiste est à l’écoute de la
nature, de ses bruits et de ses murmures, à l’écoute des arbres,
du vent qui bruisse dans les feuilles, sensible aux vibrations, au
fluide de la sève ruisselant dans leur veine, à leur dialogue dont
il semble connaître les signes et percer le mystère.
Il
module avec habileté leur ossature, leur carcasse, leur excroissance
osseuse, suit la trame de leur corps, creuse leur courbe pour les
mettre en révérence, en contorsion, en flexion, comme en prière,
exprimant ainsi le mouvement par ses ondulations graphiques. Il les
fige parfois dans une statique et monumentale immobilité, dans un
parfait équilibre, oscillant entre force et fragilité.
Il
donne sacralité à sa tronçonneuse, objet du quotidien, outil de
son travail, qu’il manie avec aisance, dans une chorégraphie
gestuelle et corporelle, à l’instar du violoniste jouant avec son
archet, ou le danseur dans une grâce animale, avec sa partenaire.
Ses
sculptures d’une humble grandeur, agencées dans son immense
jardin, celui digne d’un conte de fée ou d’un paradis rêvé,
conversent « des choses de l’éternité », de
l’immensité de ce monde, nous élevant du terrestre pour rejoindre
la grâce et la plénitude des espaces célestes.
Un
dialogue silencieux s’établit entre le ciel, les étoiles, la
lune, le soleil et le cosmos.
Au
fil du temps, elles sommeillent sous les rayons du soleil ou les
gouttes de pluie, captent la lumière à travers leurs interstices,
porteuses enfin d’immortalité et vouées ainsi à l’éternité.
Ses
« cœurs d’arbre » selon l’expression de l’artiste,
de forme cubique, continuent de battre, gardant ainsi l’âme de
ses arbres défunts.
Cette
communion avec la nature et ses éléments avait également été le
choix de Chabaud, exposant de son plein gré, ses sculptures de
pierre dans son jardin, avec le désir de les voir se modeler et se
façonner, dans un but esthétique, sous la douce érosion et la
patine du temps, leur donnant ainsi une charge émotionnelle
supplémentaire, celle du vécu, de la sagesse et de la pérennité.
Les
femmes de Nucera, déesses de la fécondité, figures monumentales,
pleine de force et d’allégresse nous révèlent une grande
humanité. Elles sont généreuses et nourricières comme les
baigneuses de Chabaud, dévoilées à cette occasion, peintes sur une
large toile dans un trio puissant. La rencontre s’annonce
extraordinaire entre les deux artistes, évoquant la femme maternelle
aux courbes enrobées, porteuses de vie, à l’origine du monde,
suggérant ainsi, cette année encore à la veille de Noel, le thème
de la nativité et de la vie éternellement recommencée.
Quand
aux provençales en méditation sur la colline de Chabaud, Parques
perchées dominant le monde d’un regard généreux, elles vont se
retrouver face à face avec celles du sculpteur, nées de l’arbre,
déesses provençales en position hiératique, cariatides totalement
mystiques, en sage et silencieuse contemplation devant Dame Nature
qui s’offre à elles. La statique et sublime monumentalité de
l’œuvre des deux artistes se rejoint.
La
sculpture de Nucera , nous révèle son empreinte graphique faites de
stries, de traits et de courbes dynamiques dans une palette de
craies sanguines, couleurs chaudes de la terre , reflets bruns de
terre brulée exprimant mouvance et dynamisme avec virtuosité.
Quelques dessins de l’artiste viendront illustrer cette approche du
dessin essentiel dans son travail de sculpteur.
L’œuvre
de Marc Nucera est sculpturale mais également graphique et picturale
tant sont riches et surprenants les abords nuancés de sa matière
boisée.
La
modernité de cette œuvre empreinte des grands courants de l’art
du XXème siècle, expressionisme, art brut, cubisme, futurisme et
abstraction est d’une contemporanéité révolutionnaire par sa
monumentalité et sa singularité, et digne des grands noms du Land
Art.
Marc
Nucera demeure malgré tout un artiste libre, on va dire marginal et
qui ne se soucie plus du regard des autres. Il se situe hors du
système de l’art avec la volonté de créer mais sans
nécessairement le souhait de s’inscrire dans un champ artistique
avec la reconnaissance qui va avec.
Détaché
de toute contraintes esthétisantes, et de toute forme de normalité,
seule la raison du cœur l’emporte. Amour, passion, volupté,
fulgurance génèrent sa virtuosité.
Cette
liberté est synonyme de richesse car elle rend l’œuvre de
l’artiste unique et lui insuffle une force d’une extrême
vigueur.
La
communion étroite avec la nature reste le lien fondamental qui unit
les deux artistes. Marc Nucera aurait très bien pu citer à l’instar
de Chabaud :
« je
suis en communion avec la nature qui m’entoure, je ne veux être
l’esclave que de la nature et de mon cœur, et puiser, sans
intermédiaire, à même la vie ». ou encore, « Mes
œuvres prennent toute leurs sources dans la nature, seule base
inflexible sur laquelle échafauder une œuvre d’art, et hors de
laquelle tout est folie » et de conclure « Les maîtres
admirables qui ont laissé leur trace indélébile dans l’histoire
de l’Art, ces maîtres que les Joseph Prudhomme de l’Art invoque
contre nous, j’ai la prétention de ne pas les trahir. Je les
vénère avec ferveur, avec reconnaissance, avec attendrissement.
Mais j’estime que la seule façon de les honorer, c’est de ne pas
être leur esclave ».
Le
sculpteur, qui , à l’instar de Chabaud, est aussi un penseur, ne
rajoute t’il pas en parlant de son travail, « Une révolte
pour vouloir croire en une humanité. Car le langage du cœur
démontre l’existence d’un monde parallèle, indissociable de
notre réel ».
Il
nous déclame aussi en tant que poète, « vouloir croire que la
poésie, ce sont des actes sacrés, que les Arts vrais sont
l’avenir ».
Un
face à face puissant avec le Maître qui risque de faire « vibrer »
les murs du musée Auguste Chabaud en cette fin d’année 2016.
MARC NUCERA A CHAUMONT SUR LOIRE
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UNE VIDÉO
"Nucera, à fleur de bois", un film de quarante-cinq minutes de François Manceaux a été
réalisé sur l'artiste
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