Le Cellier propose une nouvelle exposition " Patrimoines revisités".
De cette exposition j'ai retenu le travail troublant et magnifique de SOPHIE ZENON
La photographe a porté son attention sur les réserves du palais du Tau : les nombreuses statues qui les habitent ont été, en un magique instant, ranimées par son écriture photographique.
Comme le dit fort justement Gabriel Bauret " fortement inspirée par ses études chamaniques, elle ne s'interdit pas d'associer à l'image qu'elle propose de cette statuaire une forme de révélation des esprits des ancêtres".
A découvrir absolument dans une des vitrines un livre d'artiste fantomatique et prodigieux.
J'ai passé du temps sur le site de SOPHIE ZENON et je vous propose aujourd'hui sur les Grigris
quelques photos de l'exposition rémoise et des photos glanées sur internet ....
«
Personnel comme tout univers, celui de Sophie Zénon est empreint de
quelque chose de mystérieux et de magique, comme si le chamanisme, objet
de ses études universitaires, avaient le pouvoir de ressurgir dans ses
images. [...] Des images de Sophie Zénon, on retient d'abord la poésie,
la sensibilité et l'intemporalité. Elles se tiennent dans une dimension
particulière, où le réel n'a pas vraiment de prise, reflet d'un univers
très personnel nourri d'une histoire peu ordinaire, de la lumière de sa
Normandie natale, de l'Italie de ses origines, de ses rêves d'ailleurs,
toujours réalisés, de son intérêt pour l'anthropologie et l'histoire de
l'art. [...] Sophie Zénon ne croit pas au pouvoir de la photographie de
changer le monde. C'est peut-être la raison pour laquelle, pourtant si
concernée par la mort et la disparition, elle se tient néanmoins loin
des guerres et des conflits. Sa quête est plutôt orientée vers la
question du "passage" : pays en transition, situations en pleine
mutation et évidemment, le grand passage, celui de la mort, qui demeure
centrale dans sa quête [...] En Mongolie, au Cambodge ou ailleurs,
Sophie est la recherche de ses images intérieures ; ses voyages
deviennent un écran où se projeter ; les lieux, le décor du combat entre
ses anges et ses démons qui la précédent ou la suivent, partout dans
ses pérégrinations. »
Laura Serani, extrait de la préface du livre d'artiste Roads Over Troubled Water, Schilt Publishing, Amsterdam 2010.
Livre d'Artiste -" In case we die, Palerme- Variation n°1 " . Leporello, couverture textile, tirages argentiques- rehauts d'aquarelle et or
"Historienne
et ethnologue de formation, son travail de photographe s'enrichit au
contact de nouvelles cultures. Elle sillonne à maintes reprises l'Asie
(Mongolie, Sibérie extrême-orientale, Cambogde). Depuis les années 2000,
elle exécute un travail plastique sur le geste et le savoir-faire,
mettant en lumière les relations entre le lieu, le matériau, l'outil et
l'homme. Depuis 2009, elle développe ses thèmes de prédilection : la
disparition, la mémoire, la transmission. Sophie Zénon alterne
photographies d'ordre documentaire et démarche plasticienne avec la même
fascination pour ce qui touche au mystère, au rituel et au sacré. Elle
obtient le prix Kodak de la Critique et est Lauréate 2015
du prix de la "Résidence pour la Photographie" de la Fondation des
Treilles ainsi que de la résidence Halsnoy Kloster (Norvège).
Ses œuvres sont exposées dans des centres d'art contemporain, musées ou
salons, accueillies dans de nombreux festivals et acquises par des
collectionneurs privés et des institutions publiques dont, entre autres,
la Maison Européenne de la Photographie à Paris."
Si absent et si présent
Par Béatrice Gernot
Si la photo est « le medium de l’écriture du vacillement qui pose dans un même mouvement présence et absence », il n’est qu’à s’intéresser au travail de Sophie Zénon pour le mesurer, et plus précisément, regarder ses photographies des très célèbres momies du couvent des Capucins de Palerme. Elles sont grandes, immenses, déstabilisantes et ne peuvent que nous questionner sur la vie et sur la mort. Pour moi, les voir et les revoir me ramène toujours quelques années en arrière. C’était un été à Palerme, je voulais exorciser ma peur de la mort alors que mon corps était en train de donner vie. Je voulais voir. Portée par un sentiment d’attraction- répulsion, je suis entrée dans les catacombes pour les affronter, et fus troublée. Car ces momies disent la vie bien au-delà de la mort, la vie de ces hommes et de ces femmes qui laissent trace, expriment encore un peu ce qu’ils étaient – socialement parlant – dans leurs soieries, velours et dentelles… Elles semblent nous regarder, et forcent à nous interroger tant leurs rictus nous interpellent. Adossés aux murs, ces corps desséchés nous parlent, nous questionnent. Mais comment a-t-il donc été possible d’en faire l’objet d’un travail photographique.Une réponse nous est donnée par Sophie Zénon, ethnologue, plasticienne et photographe qui explore la mort en Occident et la représentation du corps après la mort. Le premier volet de son cycle photographique intitulé In Case We Die est dédié à ces momies. Trois semaines parmi 8000 momies, trois siècles visités au travers de ces corps déshydratés d’hommes et femmes confiés aux moines entre 1559 et 1920 , et un résultat époustouflant : des corps comme remis en mouvement, revenus à la vie. Elles sont étrangement belles ces immortelles toutes en demi-teintes, ô combien fascinantes et déstabilisantes. Un esthétisme d’une grande intensité qui n’occulte en rien les étranges sentiments qui nous habitent : fascination, peur, effroi…connivence, reconnaissance de ce qu’elles ont été : des êtres vivants, comme nous, avec leur histoire, leurs forces et leurs faiblesses. Si ces momies défient le temps, elles nous renvoient aussi à notre propre finitude. Le travail de Sophie Zénon vient avec son objectif laisser le temps au temps, le temps de les saisir et de les faire revivre, et de nous rappeler que vie et mort sont étrangement liés.
De
projets en projets, Sophie Zénon affirme son écriture, développe un
univers personnel et atypique où l'expérimentation occupe une place
centrale. Pour chaque nouvelle recherche, elle fait appel à un outil
photographique différent, à une technique de tirage spécifique ou à un
support particulier. Ainsi naissent de somptueuses matières, des objets
uniques, des installations ou encore des livres d’artiste.
Sophie
Zénon réalise ses premières photographies à la fin des années 1990 en
Mongolie, un pays qui la fascine pour ses grands espaces et pour le
rapport de ses habitants à une nature qui vibre, palpite. Sa découverte
du chamanisme, ce système global de pensée dans lequel le monde
invisible, et notamment les ancêtres, interagit avec le monde des
vivants, la mène en 1998 à reprendre des études universitaires en
ethnologie et en sciences des religions. Marquée par cette expérience,
sa démarche artistique se concentre depuis la fin des années 2000 sur
cette préoccupation de la disparition, sur la mise en scène
photographique de l'absence, sur notre rapport au corps après la mort, à
la filiation. Ses photographies des "Momies de Palerme"
(Italie) est emblématique de sa démarche. Saisies avec délicatesse,
elles semblent vibrer, voire danser, entre présence et disparition,
faisant ainsi vaciller la frontière entre la vie et la mort.
Lauréate
du prix "Résidence pour la photographie" de la Fondation des Treilles
(2016), du Prix Kodak de la Critique (1999), de la bourse Chroniques
Nomades (2000), nominée à la villa Kujoyama (2015), au Prix Niépce
(2011, 2015), au Prix de l’Académie des Beaux Arts (2010), son travail
fait l’objet de nombreuses expositions en Europe et a intégré des
collections publiques.
Sophie
Zénon est représentée par les galeries Thessa Herold (Paris), Les
comptoirs arlésiens (Arles) et la galerie Schilt (Pays-Bas).
Sylvie Hugues
LE SITE DE SOPHIE ZÉNON
L'OEIL DE LA PHOTOGRAPHIE
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FESTIVAL DU REGARD
(cliquer)
JUSQU'AU 31 DÉCEMBRE
Le Cellier – espace culturel
Rue de Mars
51100 Reims
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