Je rentre de
Finlande !
J'y suis allée pour
réaliser un de mes rêves d'Art Brut et découvrir LE lieu mythique,
l'équivalent du Palais du Facteur Cheval en France : l'environnement
de VEIJO RÖNKKÖNEN à Parikkala, près de la frontière russe.
Bien sûr, il y
avait eu des photos, une vidéo même, mais pénétrer sur ce site
fut une expérience très très forte; tellement forte que j'y suis
allée puis retournée et qu'une pause fut indispensable dans ce trop
plein d'émotions.
Parikkala, ce sont
550 sculptures sur 5000 m2.
Cet environnement se
compose de différentes parties distinctes : le jardin du yoga qui
compte à lui seul 250 sculptures dans des positions ahurissantes de
souplesse. C'est par là que se fait l'entrée aujourd'hui. Rappelons
que Veijo pratiquait le yoga dés le réveil. Dans un des rares
portraits de l'artiste, il est assis, baigné de lumière dorée, au
milieu de ses personnages, comme s'il était l'un d'entre eux.
Du vivant du
créateur, l'entrée se faisait par l'allée des personnages des
différents pays ( une foule hétéroclite: une religieuse et un
ecclésiastique, un marin, un homme torse nu en costume traditionnel
finlandais, une femme portant sac à main et chapeau de soleil, un
enfant tenant dans ses bras un lapin...). En face de ceux-ci, la
parade des enfants. Enfin, entre les deux, un espace avec des animaux
(kangourou, autruche, chameau, ours, tortue, chouette...), des scènes
de la vie quotidienne avec des femmes lavant du linge. A noter aussi
la surprenante et inexplicable présence d’un dinosaure dans le
jardin du yoga.
D'autres scènes
plus douloureuses : un garçon se penche sur un arbre et un examen
plus approfondi révèle qu'il est fouetté par un homme. En
revanche, certains personnages féminins portent dans des jarres ou
dans leurs tabliers des fleurs.
Parikkala est un
lieu qui génère fascination et répulsion, admiration et
inquiétude. On est dans un sentiment proche de la découverte d'un
tableau de Darger et dans une tension rappelant le film Psychose.
Il y a tout d'abord
ce mouvement statique, l'apologie du corps, les colonnes vertébrales
parfaitement dessinées du jardin du yoga, les sourires grimaçants
de certains personnages (les dents sont des dents véritables, les
yeux, au fil du temps n’ont pas vieilli de la même façon,
certains sont devenus opaques ce qui ajoute bien évidemment au
malaise), les bras levés en signe de bienvenue des personnages de
l'entrée mais aussi leurs bouches ouvertes sur un cri . On oscille
entre visages extatiques et agressifs.
Ce premier sentiment
de tension et d'angoisse est remplacé dans un deuxième regard par
une grande compassion et beaucoup d'interrogations sur cet homme dont
on devine la vie difficile. Ainsi, c'est après le décès de sa
mère, en 1996, que Veijo s'est consacré aux sculptures des enfants.
On est ici dans un
environnement "habité", dans un travail sans aucun doute
thérapeutique qui a su donner goût à la vie à son créateur.
Très vite on se
rend compte que nous avons face à nous des autoportraits et que ces
enfants déclinés à l'infini ou que ces hommes pratiquant le yoga,
ne sont autres que le créateur Veijo Rönkkönen.
Celui-ci est né en
1944 et décédé en 2010.
Sa première
sculpture date de 1961. Il a commencé à travailler à 16 ans dans
une usine de papier à Parikkala. Avec son premier salaire, il a
acheté des sacs de ciment, des arbres et des fleurs et ce fut le
début de 50 années de création. Veijo sortait peu, mais il a glané
dans les livres toutes les informations nécessaires à la
réalisation de ses sculptures. Il n'allait pas au devant des
visiteurs, ne demandait pas d'argent mais laissait son jardin ouvert,
se réjouissait des visites puisqu'il laissait un livre d'or à la
disposition des visiteurs pour recueillir le nom de ceux qui venaient
jusqu’à lui. Homme réservé, il a invité le monde à venir à
sa rencontre. En revanche, lorsqu'un prix lui fut décerné en 2007,
ce fut son frère qui alla chercher la récompense en son nom.
Veijo ne voulait pas
penser à l'avenir du parc. Il a toute sa vie refusé de prêter ses
statues aux musées pour des expositions. Il disait qu'il voulait
l'enterrer dans le sable et le laisser dans un silence de mille ans
comme l'armée de terre cuite chinoise. Par chance, un homme
d'affaire et amateur d'art Reijo Uusitalo a acheté le site,
collaboré avec l'Association ITE et permis l'ouverture au public en
juillet 2011
Cet article est paru pour la première fois dans le ARTENSION du mois de septembre/octobre 2018 :
VEIJO RÖNKKÖNEN ET LES GRIGRIS DE SOPHIE
SUR ITE
SUR SPACES
LE SITE DE CET ENVIRONNEMENT
EN ANGLAIS
CHEZ HENK VAN ES
UNE VIDEO
UNE AUTRE
MON TEXTE TRADUIT EN ANGLAIS PAR HENK VAN ES
(cliquer)
(photo du site)
JUIN 2018
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