"Denise et Maurice n’élèvent pas mille vaches, cent mille porcs ou un million de poulets, leurs seuls animaux (sans compter la basse-cour) pour le plaisir de la compagnie sont un chien, une truite, une oie et une grenouille. Dans leur hameau de Lozère, pour mettre un peu de beurre dans les épinards de leur plutôt modeste retraite d’ouvriers-paysans (Maurice travailla aussi dans une scierie et Denise empaillait les chaises), ils cultivent encore leur terre, tout en dressant des épouvantails. Entendons-nous bien : quand nous disons “dresser”, pas de spectacle pour le cirque et d’épouvantails qui feraient les beaux pour un sucre. Non, leurs épouvantails, ils les installent debout dans leurs champs, le garage, l’étable (devenus musées), ce peuple déborde, il y en a des centaines. Mais quand les épouvantails des champs ont trop subi les rigueurs du climat de l’Aubrac, quand leurs vêtements tournent en guenilles, ils finissent en beauté, dans les flammes de leur paradis.
Cela commença pour protéger la basse-cour contre les éperviers : quelques épouvantails de-ci de-là. Puis, un miracle, les voilà qui se multiplient sous les doigts de Denise (à l’habillage et au maquillage) et Maurice (à la recherche du bois qui servira de corps aux créatures). “Je m’amuse, répète à l’envi Denise, la vie est courte, c’est pour le plaisir.” Plaisir de parer ces êtres, de leur confectionner des yeux avec des capsules de bouteilles de vin, mais aussi d’enguirlander (nous voulons dire : agrémenter de guirlandes) les abords de la ferme avec des pots de cierges que le bedeau de la paroisse leur met de côté."
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Périple 2016
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