Passage à Saint-Dizier et nouvel arrêt pour prendre des photos du Petit Paris !
Un texte de Henri-Pierre Jeudy pour accompagner mes photos :
Magasin de lingerie et de bonneterie, le Petit Paris a été
transformé par Marcel Dhièvre en ce qu’il est convenu d’appeler un lieu «
d’art insolite ». Pour des raisons de taille, l’espace choisi par des
habitants paysagistes est rarement dans une ville, il se trouve plutôt à
l’écart des milieux urbains. Choisir son propre magasin en ville est
une manière de capter quotidiennement le regard des citadins dans
l’espace public.
En ne se retranchant pas sur un territoire plus ou moins caché que les
gens viennent découvrir, tel un secret dévoilé, Marcel Dhièvre offre la
possibilité d’une visibilité immédiate des multiples expressions
métaphoriques de sa féérie. Les façades qui ne sont pourtant pas
grandes, présentent sa légende en « pleine ville », provoquant des
effets d’étrangeté malgré la vue familière qu’impose son implantation
rendue plus monumentale depuis sa restauration. Le Petit Paris
manifeste sa souveraineté urbaine grâce à la passion de cet homme
inventif qui a créé en son lieu une véritable constellation de symboles
connus de tous. C’est un livre « à ciel ouvert ».
Dans sa voyotte, Marcel Dhièvre travaillant chaque jour l’édifice
lilliputien de son Petit Paris, conviait les voisins et les passants à
confectionner les façades de leurs habitations, aussi exigües
fussent-elles, en paysages imaginaires. Aurait-il souhaité que dans
toutes les voyottes les fruits de l’imagination de chacun créent une
nouvelle esthétique urbaine ? Le terme de voyotte serait alors devenu
l’expression d’un
mythe. Une nouvelle utopie urbaine aurait été mise en scène avec une
reconquête de l’espace public par le travail quotidien de créations pour
le moins singulières.
Ce que Marcel Dhièvre, tout au long de sa vie et du temps consacré à son
œuvre, révèle au regard des passants et des voisins, c’est le paradoxe
d’une « intimité publique ». Comme dans un rêve éveillé, il dévoile
l’intimité de son imagination en la figurant dans le grand récit de ses
deux façades du Petit Paris. Il recrée publiquement une énigme familière
qui soutient la lecture pour tout un chacun de ce récit devenu légende
du monde tout en puisant son inspiration dans les signes tangibles de la
réalité telle qu’elle nous est présentée conventionnellement.
Marcel Dhièvre tire de la convention (la Tour Eiffel représentant Paris)
ce qui fait la puissance de son imaginaire. Il intériorise le dehors en
jouant avec les signes les plus stéréotypés de notre culture. Telle est
son originalité de citadin paysagiste.
LE PETIT PARIS ET LES GRIGRIS DE SOPHIE
(cliquer)
Juin 2023
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