Lors de la Biennale Hors Normes Volcanique 3, en octobre 2023, le poète Jean-Louis Clarac a écrit ces textes qu'il a eu, comme en 2022, la gentillesse de me confier ...
Joël CRESPIN
La résille du réel laisse paraître
Un fouillis animal dans la texture
À vif de mondes sens dessous dessus
Tramée foulée par les bêtes
Cheval chat chien félin poule
Les humains y cherchent aussi leur voie
Et tous vont diffusant sur leur passage
La vivacité pigmentée
De leurs énergies
Femme et homme
Étreignent leurs sensualités
En la danse éphémère
Et risible d’un semblant de panache
Couple en quête
Jamais satisfaite toujours répétée
D’une complicité en avant
Issue du lointain
Les corps masquent dans les pliures
De leurs reliefs aléatoires
L’apparent enchevêtrement des chairs
Le souffle spontané tisse
Les fronces les mailles les croisements des êtres
Matité et brillance de leurs silhouettes
Figures forgées
Postures déformées
À l’épreuve des aléas
Impondérables existentiels
Moment ouvert
Au présent
Du saut de l’intime
Qui déborde les tamis
De tous les vertiges
Qui libère de tous les repères
Saisie fractale
Des règnes du vivant
Avec leur maladresse ou leur habileté
Entre le repos et le bond
En des gestes instinctifs
Reliant désir et plaisir
À l’instant même de leur apparition
Hélène BLONDIN
Renouveau
Recommencement
Renaissance
Les vivants se rencontrent
Sur un fonds invisible déjà là
Indispensable
Aux mille et mille vies
Qui verdissent et reverdissent
Dans les scénettes cernées
Comme autant de parcelles
De vies à partager
Le hasard a mis du désordre
Dans cet agencement entre
Lune et soleil
Ici dans ce jardin
D’un Eden au présent intemporel
Aux multiples territoires
De la nuit au jour
Du jour à la nuit
Tout est dans tout
Rien ne vient troubler
La tranquillité des êtres
Qui se rassemblent
Quelles que soient les saisons
Un univers de sororités
Étend son réseau de rêves
Sur d’insaisissables arpents
De flores et de faunes
Sur de riches espaces en partage
De sirènes d’oiseaux de poissons
D’arbres de papillons
Les femmes ensemble enlacées
Lèvent le voile sur la paix régnant
Dans les enclos à l’écart
Du Monde extérieur
Leurs visages
Baignés de lumière
Aux yeux grands ouverts
Fleurissent un nouveau Monde
Embrassant tous les paisibles
Mondes infimes
Magali TARAGONNET
Les secrets sont souvent bien gardés
Enfouis sous des amas
De rouilles et de terres
Certains s’échappent s’égarent
Du carrosse cabossé du Colporteur
Ils dévoilent dans l’actualité
Des pensées et des actes
Que certains voudraient
Indicibles irracontables
Dont le scandale sauterait aux yeux
S’ils étaient révélés
Comme si entre le dedans et le dehors
Entre ce qui habituellement est tu
Et ce qui exprime tendresse et compassion
La magie créatrice jouait
À la limite entre dérision et vérité
Sa partition aimante de l’Humanité
Retour aux sources
Ou échappée vers l’avenir
L’humour englobe
La force des êtres
La farce des choses
Et l’inverse aussi
Malgré la poussière du temps
Finement déposée
Sur l’ordre chaotique du Monde
Les personnes célèbres ou symboliques
De poussières ou rouilles
De rouilles ou bois flottés
De bois flottés ou rebuts des bordilles
En fuite de silence
En éclats de présence
Anonymes ou non
Toutes pareilles
Et toutes dissemblables
Les personnes cheminent
Font leurs vies
Cahin-caha sur les cahots
Qui trouent le carrosse
Des sociétés outrées
De tant d’écart de vies
Sarah GUIDOIN
À l’aurore du Monde
Ou à son crépuscule
À l’orée des forêts
Et même en leur cœur
À la frange des rêves
Aussi bien qu’en leurs nœuds
Elles plongent leurs yeux
Aussi profonds
Que la nuit cosmique
Dans nos propres regards
Hybrides guetteuses
Entre le faune et la plante
Incarnations mutantes
Drapées dans la blancheur
De leur silence
Hermaphrodites
Aux lianes larmoyantes
Elles cherchent la clarté
Fragiles créatures
En appel d’empathie
Ou de bienveillance
À leur égard
Fragiles créatures
Sont-elles ce que nous fûmes
Dans la pureté perdue
Sont-elles ce que nous serons
Dans le blanchiment à venir
Génies de la forêt elles pleurent
Sur la délicatesse de leurs parages
Elles nous alertent
Sur son possible effacement
Êtres diaphanes elles espèrent
L’heureuse métamorphose du Monde
Enrobées de leurs brumes
Légères et lumineuses
À l’unisson de nos espoirs
Peuvent-elles puiser dans nos regards
La vision vive d’une Terre
Que la rosée de leurs larmes
Alors de joie
Rendrait vivable
MARCOLEPTIQUE
Appel à la découverte
Invitation au voyage
Dérive des continents
Lieux d’inconnaissance
D’étranges géographies
Dérèglent le Monde
Lieux d’inconnaissance
D’insolites anatomies
Désordonnent le Corps
Les vues du ciel
Chambardent les repères
Les coupes anatomiques
Bouleversent les organes
De multiples chemins palimpsestes
Élargissent un monde
Viscéralement cartographié
Creusent un corps
Anatomiquement décortiqué
Les personnages découvrent
L’entrelacs des voies nouvelles
Aquatiques et minérales
Le jointement du réel et de l’image
Trouble le filigrane des contrées
Côte à côte ou face à face
Hommes et femmes affolent
Par leur souffle par leur cri
Par leurs regards complices
Les frontières aléatoires
Que l’on croyait immuables
Des éclairs de tendresse
Des éclats d’humour
Constellent les espaces définis
Infinis indéfinis
Des terres et des océans
En un grand chamboulement démiurgique
De l’Histoire baignée d’imaginaire
Patrick ADAM
Monde d’avant ou d’après
Ou bien monde de l’entre-deux
Animaux et gueules
Dérangent l’Humanité
Antre où se forgent les monstres
Où sont fondus les identités
Dans une apparente provocation
S’agit-il d’humains déshumanisés
S’agit-il d’animaux dénaturés
À quel moment de la chaîne sans âge
Surgissent-ils
Tant d’interrogations sans réponse
Qui étirent le temps
Jusqu’au présent
En équilibre
Sur le point de bascule
Entre réel et fantastique
Sur la crête indécise
Entre normalité et folie
Les chimères jaillies
Du fin fond des forêts inconscientes
Enveloppées du velouté éclatant
De leur derme si étrange
Appellent à mordre la vie
À pleines dents
La tourmente des figures tordues
En un rictus énigmatique
S’évanouit dans l’atmosphère
Caressante des flores frêles
Mâchoires prêtes à déchirer
Gueules à l’instant de dévorer
Leurs proies invisibles
Corps en instance de bondir
Hors de leur monde fantomatique
Les créatures immobilisent
Le mouvement intemporel
De leur espèce provenue
De lignées ni sauvages
Ni apprivoisées
Simplement prises
Dans les filets
De la diversité
Jean-Louis Clarac a écrit tous ses poèmes en situation, dans le temps de l'exposition de la BHNVolcanique. C'est un challenge que Jean-Louis s'impose : écrire à partir des œuvres exposées, donc ici en octobre 2023.
JEAN-LOUIS CLARAC ET LES GRIGRIS DE SOPHIE
ET ICI
(cliquer)
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