JEAN-LOUIS CLARAC a eu la gentillesse de m'envoyer les poèmes qu'il a écrit en 2021 sur des artistes qu'il aime et que j'aime ....
Pierre AMOURETTE
Maternel matriciel
Du magma matière
Du magma terre
Fleurissent poussées après poussées
Corolles et vagues
Plis et méplats
Tendus vers le haut
Dans les concrétions que le feu minéralise
Chevelures hérissées ébouriffées
Les visages défigent leurs traits
Leur pureté brute étonne
Les corps émergent de l’amoncellement
Éruptif des argiles fusionnées
Corolles et vagues
Figées et mouvantes
Les visages regorgent de générosité
Les bras arrondissent le geste d’amour
La douce étreinte protège l’enfant
Mais Furie ou Gorgone
L’étouffe peut-être
Telle Médée démente
Telle Piéta douloureuse
Saisies dans l’ambivalence de la posture
Elles sont là plusieurs en majesté
Semblables et jamais pareilles
Furies ou Gorgones
Aimantes ou mères
Étreignant l’enfant
Dans un fouillis de lézards ou d’oiseaux
Ils sont là plusieurs
Farfadets ou sorciers ou vieillards
Fourbus malicieux ou décharnés
Faisant un pied de nez à la bienséance
Cherchant à se dégager des prosaïques épreuves
Du vent qui les traverse du cheval qui se cabre
Des taureaux bourrus sous le faix
Jaillie du feu
Nourrie de l’énergie du magma matriciel
L’incandescence
Répand son aura cathartique
DARÉDO
Dans l’inextricable forêt
Dans sa luxuriante densité
Dans l’entrelacs des lianes
Dans les résilles souterraines
Lentement naissent
En grouillements aléatoires
Les êtres des bois
En quête de lumière
Ils cherchent
Et tournent indéfiniment
Dans le fouillis
Vers l’échappée hors silence
La mémoire des arbres
La mémoire des faunes
Englobent des souvenirs enfouis
Prêts à franchir l’orée du jour
En circonvolutions changeantes
Les êtres emmêlent leurs souvenirs
Jusqu’à l’hybridation
Des oiseaux des humains des reptiles
Des plantes des mycéliums
Dans une nouvelle arborescence
Où l’étrange et l’ordinaire jouent
À perturber la vision normative
Des classifications du vivant
Dans les humus labyrinthiques
Flottent les molécules premières
Vibrent les créatures fantastiques
Des êtres enlacés imbriqués
Unis par l’envie d’atteindre
La lisière diurne du visible
C’est la forêt primitive
La source du chaos organisé
La trame infinie des chimères apprivoisés
C’est la traversée des apparences
La sortie de l’enfouissement
L’enserrement détissé
L’élargie en dehors
Vers la clarté nouvelle
Jean-Luc GIRAUD
Un regard
Qui vient du plus loin
Éveille en soi
Le plus profond de soi
Un regard
Qui vient du plus près
Aimante à lui
Le reflet de qui observe
Une litanie cadrée
D’où déborde abondante
L’ouverture aux simples
Chapeau lapin
Chapeau cochon
Chapeau chat
Chapeau oiseau de nuit
Chapeau bas faunes et flores
Des lac ruisseau bosquet
Fantasmes félins
Fantômes porcins
Fantasques ovins
Congruent vers
Nos propres imageries animales
Face à l’autre
L’humain l’animal le végétal
Le miroir de soi révèle
Une histoire commune
Où perle le frisson des sentiments
Où perce l’amour pour les autres
Cachée derrière l’ironie envers soi
C’est un face à face bienveillant
Qui démultiplie le regard
Dans le terreau des émotions
Dans l’écoulement de la vie
Entre mélancolie et force du vrai
Traversant la profusion portraitiste
Regard
Où se lit entre dérision et lucidité
L’amour de tous
L’amour du vivant
Jean-Christophe HUMBERT
Du plus infime insecte
Au gigantesque reptile
De l’auroch à l’humain
Se déploie l’éloge ombilical
Des êtres dénudés
Jusqu’à l’os du réel
Des êtres couverts
Des oripeaux de la vie
Totems et statues
Boucliers et pavois
Pérennisent
Hordes peuples meutes
Troupeaux essaims cocons
Ils clament leur simplicité d’être
Au monde
Monde sans hiérarchie
Monde d’ossatures et de carnations
Monde où l’intime et le visible
Ne se distinguent que par
L’écart léger du regard posé sur lui
Ce monde aux blasons ordinaires
Qui n’a rien de tribal mais tripal
Rien d’ethnique mais éthique
Condense l’assemblée commune
Du vivant
Et dès lors extraordinaire
Chaque parcelle de ce monde
Transfigure les angoisses originelles
Les désirs primaires
En un mouvement
Où les êtres en apparence immobiles
Sont en devenir constant
Au point de bouleverser l’ordonnance
D’un lointain sans limite
Au prochain déjà passé
Le grand borborygme du monde
Résonne au rythme des espèces
Dans l’ordre fractal
Du ventre de la terre
Où tout tremble du gigantesque à l’infime
CHRISTOPHE
Sur le fil de la vie
Vibrent sans fin
Humains et animaux
En apesanteur
Ils s’évadent s’élèvent
Volent planent
Au-dessus des nuages orageux ou calmes
Des aléas modernes
Dans la tête est un pays
Flottant au gré des mouvements
Des humeurs vagabondes
Des gestes pris dans le carcan
Des jours et des nuits
La vie la vie
En permanente instabilité
Dérègle l’agencement de
Toutes les existences assemblées
Dans la matière dense
À profusion
Pied de nez aux travers
Contemporains et répétés
Mais une fois grattée le vernis de l’ironie
S’efface la moquerie et
De la rouille du palimpseste révélé
Sourd alors l’empathie
Pour ces êtres laissés pour compte
Femmes et hommes
Enfermés dans le quotidien le plus humble
Des histoires banales et révélatrices
De la fragilité du vivre
L’équilibre volatil des situations
Sublime dans l’objet prosaïque
Du métal et du bois
Le flot de la vie
Vers le retour au très bas
Après l’envolée dans les nuées
Une façon de trouver sa place
Dans le manège de la vie
Où tourbillonne un vent de liberté
Florence JOLY
Du tréfonds mental
Surgissent les visages
D’un monde où le rêve
Subjugue le cauchemar
Où affleurent
Les réminiscences de l’enfance
Du tréfonds mental
La vanité de l’existence
Métamorphose l’angoisse d’être
En épanouissement des
Fleurs solaires
Du tréfonds mental
Comme un maelstrom d’icônes
Éclosion des hiboux des poulpes
Germination des crânes-fleurs
En un bouillon de culture
Du laboratoire imaginaire
Où s’entretissent
Entre peurs et désirs
Entre répulsion et attirance
Les ardeurs contenues
Dans le creuset des mythes
Du tréfonds mental
Florescences successives
De l’enfant à la fille
De la fille à la femme
Aux racines abyssales
Aux ramures aériennes
Dans l’onde des songes
Mort et vie s’enchaînent
En un collier de végétations exubérantes
Les longs serpentins de l’esprit enserrent
Décèlent déroulent
Les fantômes d’images des premiers âges
Échappant aux varechs et aux algues
S’extirpant des radicelles et des branches
Le monde rompt avec les lois de la physique
C’est le désordre du vivant
C’est l’ordre des êtres chamboulé
Entre rêve et inventive réalité
Jean-François RIEUX
Le miroir déformant
Renvoie une étrange vision
Des liaisons humaines
Et pourtant familière
Le théâtre de la vie cruel et tendre
Déroule les histoires de femmes d’hommes d’enfants
En autant d’insolites portraits
Saisis dans leurs attitudes
Outrancières et risibles
Bouches torves nez tordus
Yeux écarquillés
Les figures cabossées dessinent
L’image d’un genre humain
Décalé déphasé
La caricature module leurs défauts
Où se lisent les épreuves les souffrances
Les étonnements les joies
Sur les trognes tronches
Gargouilles gueules cassées
Façonnées par le poids social et religieux
Entre comédie et tragédie
Le théâtre déroule l’histoire universelle
De vie et de mort
Le théâtre déroute le réel
Le théâtre en son cœur
Distancie ce que les êtres sont
Ou semblent être
Le fruit de leurs vicissitudes
En deçà de ce monde cru
De chair de sang et de larmes
En apparente moquerie
En semblant de dérision
En deçà de la bouffonnerie
Le vrai se fond dans le carnaval de la vie
Le masque affublé cache la personne
Derrière l’apparence grotesque
De la misanthropie
Une pudeur discrète émane
De cet étrange jeu de massacres
La pudeur des amours humaines
Christine FAYON
Le monde fanfreluche
Au cœur éclatant de vies
Sourit à la pointe du jour
Quand le sang irrigue l’horizon
La floraison explose
Entre plis et ourlets
Où s’égoutte sans aucune limite
L’abondance cosmopolite
Où se projettent les visages
Des lointains d’orient
Les oriflammes éclaboussent
Effilochent les oratoires bannières
Où les mots s’échappent dans la couleur
Les mots aux sens orientés vers
Les cœurs gorgés de sèves
Les mots discrets
Dans cet espace de silence s’épandent
Des mandorles moirées mordorées
En florilège lumineux
Les mannequins arlequins
Insufflent aux étendards
Les ondes gourmandes
Des rosaces incarnées
Entre trames et chaînes
Nœuds et boucles
Les fils d’ariane brins après brins
Ouvrent un espace d’amour des femmes
Un interstice pour l’amour de l’humain
À vif cramoisie fauve
La danse des couleurs
Emporte dans son tourbillon
L’ivresse de la joie partagée
L’exaltation déborde
Des teintures drapées
En cascades de feux d’artifices
En fêtes universelles
Des métissages du monde
Margaux SALMI
Entre la démesure et le détail
Dans les bois des fantasmes
Se mouvant parmi les monstres
Le chat alanguit sa sérénité
Sur les résurgences de l’enfance
Le chat entre douceur et force
Apaise tel un baume sur la peau
Les émotions anciennes
Et toujours à fleur
Les paysages lunaires ou désertiques
S’effacent derrière le visage
Saturation corporelle
Entre démesure et détail
Les arbres tourmentés
Penchés à contre-courant
Lancent leurs langues ou lianes
À l’assaut du ciel en fusion
Une flore et une faune extra-mondaines
Engendrent oiseaux et femmes
Félins insectes chiens
Renards chats et fillettes
Tels des fantômes
Lâchés dans l’étendue
Les aliens ces étranges créatures
Envahissent ou pénètrent
Les contrées secrètes
D’avant conscience
Les amazones cavalent
Sur des montures ectoplasmiques
À rebours des visions quotidiennes
Les êtres déguisés démasquent
L’insoutenable vie au sortir
Des jungles intérieures
Au seuil de l’intime
Ils rendent vivable sa présence
Jusqu’à ce qu’affleure
De la force et de la douceur
L’infinie sagesse de l’autre soi
KA TI
Elles surgissent du fin fond
Fantasmagorique
Des mythologies éclectiques
D’eau et de feu
De terre et d’air
Femmes jaillies des rêves
Elles déplacent le mythe
Le plus ancien au temps
Le plus instantané
Êtres fabuleux
Femmes au cœur à fleur de peau
Elles éveillent des désirs et des hantises
Enchevêtrées
Fées elles engendrent des histoires
Horrifiques et merveilleuses
Gémellaires elles redoublent
De persuasion à dévoiler
Leurs silhouettes multiples
Gorgone Hydre
Elles attirent et repoussent
Le regard posé sur elles
Les dentelles et les coquillages
Les parent d’une séduction
De sirène ou de sorcière
Entre vanité et fatalité
Elles expriment la destinée humaine
La vie la mort joue une étrange
Partie où la couleur
Avive les sentiments
Séduisantes dans leurs apparats
Leurs carnations chatoyantes et vives
Attirent médusent
Et forcent le destin
C’est un chant de sirènes irisé
Plus à voir qu’à entendre
Sinon qu’au fond de soi
Tremble l’écho des contes de
L’enfance
Jean-Louis Clarac a écrit tous ses poèmes en situation, dans le temps de l'exposition de la BHNVolcanique . C'est un challenge que Jean-Louis s'impose : écrire à partir des œuvres exposées, sur deux mois donc ici en octobre et novembre 2021.
JEAN-LOUIS CLARAC ET LES GRIGRIS DE SOPHIE
ET ICI
(cliquer)
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