J'aimerais aujourd'hui vous parler de " LA TORTUE ET LE LIÈVRE" .
J'ai mis beaucoup de temps à lire cet ouvrage et cet ouvrage m'a fait mal.
C'est consternant d'écrire une chose pareille car ce que je souhaite aujourd'hui c'est qu'à votre tour vous lisiez ce livre ... mais plonger dans la douleur est difficile et il faut le savoir .
Difficile et utile, difficile et important, difficile mais salutaire aussi ...
L'adjectif qui me vient en premier pour décrire cette correspondance c'est "sincère" , "brutale".
C'est un livre impudique et plein de pudeur, c'est un livre plein de paradoxes, c'est une histoire d'amitié, c'est une histoire de folie créatrice, c'est l'histoire d'un homme et d'une femme, c'est l'histoire d'une rencontre.
C'est l'histoire de deux êtres que j'admire et cette plongée dans leur intimité est fascinante et perturbante .
C'est l'histoire d'une correspondance entre Ghislaine et Laurent Danchin .
La femme qui "voyage son suicide à la boutonnière " et l'homme qui "court trois lièvres à la fois" .
Lorsque j'écris qu'il s'agit de l'histoire de deux êtres, j'oublie une personne indispensable à cette publication et dont le nom revient sans cesse : Claude Roffat.
Claude, créateur de l'Oeuf Sauvage et auteur d'un avant-voir magnifique, Claude ami de l'un et de l'autre ...
Pas de platitudes dans cet ouvrage, on va directement à l'essentiel et cette capacité à se livrer étonne et perturbe car elle elle est inhabituelle .
C'est un livre que j'ai lu un crayon à la main. C'est un livre qui évoque les vivants et les morts, qui parle de littérature, de cinéma, d'abandon et de monstres intérieurs.
C'est un livre sans complaisance, profondément humain et vrai . C'est la face cachée de l'iceberg, ce sont les fêlures derrière les sourires de Ghislaine et la force de Laurent .
Pour moi qui ai aimé l'exposition MYCELIUM et bien évidemment la salle consacrée à Ghislaine, ce livre est important.
Il permet d'aller au delà d'une œuvre et est bien la preuve que les choix de Laurent Danchin sont profonds et que "ses" artistes ne sont pas là par hasard .
J'ai retrouvé le douloureux travail de Ghislaine chez Danielle Jacqui cet été dans un tiroir rempli d'enveloppes toutes plus belles les unes que les autres. Des liens se tissent et j'aime ça ...
Ce livre possède, je trouve, un véritable pouvoir cathartique, il résonne en moi ... je me sens peut être moins seule avec mes cauchemars et mes insomnies . Certaines phrases, telles des maximes, restent gravées dans ma mémoire ...
Ce livre est aussi une ouverture sur le monde et sur des passions .
Il m'a donné envie de lire ou de relire, de voir ou de revoir : les lettres de Séraphine, les lettres que Sanfourche écrivait à Dubuffet, " Van Gogh le suicidé de la société " d'Antonin Artaud, " Irène" d'Alain Cavalier, " Il y a longtemps que je t'aime" de Philippe Claudel, " Les contes zen : Ryôkan, le moine au cœur d'enfant", le Musée de la crèche à Chaumont, Melancholia de Lars Von Trier, " Le voyage à travers la folie" de Mary Barnes, "Artaud et l'asile" de Laurent Danchin, les tableaux du Musée de Nancy ...
Il m'a donné aussi l'envie de découvrir ou de revoir les oeuvres des artistes cités : Jean Rustin ,Dado, Denis Poupeville, Marilena Pelosi, Sylvie Pic, Robillard, René Boisneau, Paul Gauzit, Miguel Amate, Serge Vollin, Pakito Bolino, Jean Tirilly et tant d'autres ....
Comme le dit si justement Laurent : " La façon de guérir les blessures, ce n'est pas de s'en occuper mais de passer à autre chose et l'art- l'écriture, le dessin, peu importe- nous y aide considérablement ."
Et voici l'avant-voir de Claude Roffat :
" Beau
comme la rencontre fortuite, sur la toile, d’une tortue et d’un
lièvre, ai-je envie d‘écrire, adressant un clin d‘œil à
Isidore Ducasse, Comte de Lautréamont. Rencontre pas si fortuite
cependant, puisque c’est un ami de Ghislaine, Jacques Convert, qui
la recommandera chaleureusement à Laurent Danchin. L’étonnant est
que cette rencontre qui aurait pu — aurait dû ? — être sans
lendemain, va entraîner une vive amitié et une abondante
correspondance. Pourtant, tout semble séparer ces deux êtres : l’un
est toujours entre deux trains, deux avions ; occupé à donner des
conférences, des tables rondes, à écrire des préfaces ou
organiser des expositions (j’ai toujours l’impression de courir
trois lièvres à la fois… se plaît-il à souligner) ; aussi à
l’aise sur un plateau télé que devant un micro tendu, ayant
depuis longtemps remplacé papier et stylo par le web. L’autre,
plutôt recluse, enfermée dans sa « cellule», doutant toujours
plus d’elle que des autres, vit dans un mélange de peur et
d’excitation. Elle écrit beaucoup, très vite, à la plume et à
l’encre violette ; lit ses livres mot à mot et relit chaque ligne,
voit quatre ou cinq fois le même film pour être sûre de ne rien
rater. Pour en revenir au début et en citant cette fois Jacques
Rigaut, parlant de Ghislaine, on pourrait dire qu’elle « voyage
avec son suicide à la boutonnière ».
Dès
les premières lettres le ton semble donné : Ghislaine remercie son
interlocuteur : « jamais je n’aurais pensé que vous puissiez me
répondre avec autant de sincérité », tout étonnée qu’il ait
pu la « considérer comme une vraie personne ». Laurent Danchin,
qui sait bien que l’on est toujours tout seul, « prisonnier de sa
tête, de sa vie, de son monde… », lui répond dans un mélange
d’attention et de tendresse. Il a vu la faille, la « blessure ».
Il se veut encourageant, parfois admiratif, toujours prévenant. Mais
les propos de Ghislaine le touchent, l’armure, bientôt, se fend.
C’est
donc moins des considérations sur l’art que des réflexions sur la
vie que nous livre cette correspondance. L’art ne sera souvent
évoqué que par des rencontres, des relations d’amitié. Pour
Laurent, c’est surtout Chomo, « l’ermite d’Achères-la Forêt
», qui revient tout au long de ses lettres, tandis que Ghislaine dit
son amitié pour Danielle Jacqui, « Celle-qui-peint » qui, la
première, a cru en elle, l’a exposée (elle fera même l’affiche
d’un festival d’art singulier à Aubagne). Mais c’est avec
Antonin Artaud que nos deux épistoliers vont se trouver une passion
commune. Ghislaine est fascinée par l’auteur de Van Gogh, le
suicidé de la société et de Pour en finir avec le jugement de
dieu. À cet intérêt commun, Danchin ajoute sa longue amitié avec
le docteur Ferdière, le médecin d’Artaud à Rodez.
Laurent
Danchin, qui a toujours laissé parler les autres, qui a beaucoup
écrit sur eux, pour une fois parle de lui. Mais c’est le gris qui
domine, le gris qui parfois vire au noir. Ses propos font un peu écho
à ceux de Ghislaine : « Je vais répondre à vos états d’âme en
vous parlant des miens ». Et c’est vrai que l’on est frappé par
la façon dont leurs angoisses se répondent. Pour Ghislaine, cela
s’exprime avant tout par une fascination pour la mort — sa propre
mort —, tandis que Laurent voit son salut dans la méditation, le
détachement, le recueillement.
Le
critique d’art est toujours critique, mais de la vie, de la
société. Les faisant siens, il rapporte ainsi les propos de Daniel
Cohen : « …À̀ un capitalisme industriel fondé sur une
coopération implicite entre travail et capital, s’est substitué
un capitalisme financier avec pour seul objectif, non pas
l’efficacité au sens technique du terme, mais le profit. »
Il
avait prévenu : « C’est la vie et les gens que je préfère. Le
travail, mais pas au sens des écrivains ou des artistes mais au sens
des ouvriers, des gens qui font quelque chose avec leurs mains ». Et
c’est peut-être là, au détour de cette phrase, que s’éclaire
le mieux le mystère de Danchin. L’intellectuel, l’homme cultivé,
n’a cessé de s’intéresser au travail des anonymes, des « sans
gloire ». Non pas travail de récupération, d’autres seront là
pour cela, mais travail de compassion, de mémoire. Le mariage de
l’intelligence et du cœur."
LE SITE DE LAURENT DANCHIN
LE SITE DE L’ŒUF SAUVAGE
L'EXPOSITION MYCELIUM A AUBERIVE
(cliquer sur les liens)
Pour acheter cet ouvrage contacter CLAUDE ROFFAT :
Claude Roffat
1 bis, rue châteauredon
13001 Marseille
04 91 33 61 88
Son prix est de 20 euros (sans les frais d'expédition)
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