LES GRIGRIS DE SOPHIE: JEAN-PAUL HENRY A LA MAISON 1932 A MOËLAN-SUR-MER

lundi 4 septembre 2023

JEAN-PAUL HENRY A LA MAISON 1932 A MOËLAN-SUR-MER

Le Télégramme titrait début aout "Les quatre expos à ne pas manquer avant la fin de l’été, dans le pays de Quimperlé" et évoquait la nouvelle exposition de la Maison 1932 et les dessins de Jean-Paul Henry.

"JEAN-PAUL HENRY (1945-2005) : UN CRI QU’ON N’ENTEND PAS ….

« Quand on regarde ses dessins, on croit l’entendre frapper fortement au carreau. Les coups d’un emmuré qui se signale… Et pourtant il n’y a qu’une vitre entre lui et celui qui regarde. On le voit, il crie, mais on ne l'entend pas ... "

Extrait d’un texte d’Alain Arnéodo

Françoise Casanova est passionnée par son métier et les artistes qu'elle expose. Elle en parle longuement et présente une passionnante bibliographie pour compléter ses propos. Après Christian Pinault en juillet nous avons été heureux de revenir à la Maison 1932.

L'exposition est prolongée jusqu’au 1er octobre !

Au dos de chaque dessin la signature et la date ...

Pour accompagner mes photos aujourd'hui je suis heureuse de pouvoir vous présenter un texte de Michel Leroux écrit en 2008 sur cet artiste cher à son cœur :

Jean-Paul HENRY (1945-2005)

Jean-Paul Henry naquit le 3 avril 1945 à Melun. Il était l’aîné de cinq enfants. « Un enfant sage, trop sage » nous dit sa sœur Marie-Elisabeth. En 1953, pour raison professionnelle (le père était professeur de philosophie), la grande famille s’installe à Monéteau, près d’Auxerre. C’est là, dans la maison familiale, que Jean-Paul va vivre et créer. Le début de sa scolarité est normal, mais quand il entre en sixième, ses professeurs s’inquiètent de ses difficultés à communiquer. La situation s’aggrave quand il entre en quatrième. Il arpente la cour du lycée en tenant des propos incohérents. « Henry t’es fou ! » lui crient ses ‘camarades’ … Nous sommes en 1961, Jean-Paul doit quitter l’établissement et aussi mettre fin à son parcours scolaire. Tout en étant suivi par des psychiatres, il occupe un emploi à temps partiel chez un horticulteur bienveillant. C’est en 1975, lors de séances de psychothérapie, que Jean-Paul commence à dessiner. Une passion serait-on tenté de dire, mais disons plutôt une nécessité, qui va durer près de trente ans !!! Des piles et des piles de dessins vont littéralement envahir la maison familiale. Sa mère meurt en 1991, puis son père le 29 novembre 2005. Six jours plus tard, le 5 décembre 2005, Jean-Paul meurt suite à une hémorragie liée à un ulcère dû au stress. Il n’a pas pu supporter le départ de son père.
Jean-Paul Henry nous laisse une œuvre forte, bouleversante, démesurée … Une œuvre qui va au-delà du beau académique, au-delà du beau décoratif. Elle nous vient d’une autre rive (celle de la schizophrénie), d’une autre solitude aussi. Nous pourrions penser qu’il s’est lancé dans une telle production afin de mieux communiquer. Pas du tout ! C’est plutôt parce qu’il ne pouvait pas communiquer qu’un dessin va pousser l’autre, jusqu’à dix par jours. Au fil des années, il va dépasser la ligne rouge de notre raison… Chaque dessin de Jean-Paul Henry est un cri, un cri derrière une vitre, celle du cadre, de nos cadres … On voit ce cri, mais on ne peut pas l’entendre, on ne peut pas le comprendre.
Jean-Paul Henry représente essentiellement des personnages, parfois seuls, parfois en couple, et plus rarement accompagnés d’un chat. Ils sont souvent de face. Ils nous tendent leurs bras, mais ne reçoivent que notre incompréhension… Leurs visages nous font penser à des hommes, car coiffés d’une ‘casquette’. Mais une paire de seins proéminents, voire parfois deux paires …, viennent troubler notre jugement. Les couleurs s’organisent à l’intérieur d’un cloisonnage qui, au début de sa production, se rapproche de l’écaille. Au fil des années, ce cloisonnage va se distendre puis voler en éclats … Dans la façon dont il applique ses couleurs (pastels, feutres), telles des averses de traits, on devine en lui une formidable tension. Puis ces orages de couleurs vont se transformer en ouragans. Des ouragans qui emportent tout sur leur passage : nos certitudes sur l’art, nos classements péremptoires (Art Brut ? Art Hors Les Normes ?), et ne nous laissent que l’émotion !

L’œuvre de Jean-Paul Henry est présente dans les collections de l’Art Brut à Lausanne, au Musée de La Fabuloserie à Dicy, ainsi qu’au Musée de La Création Franche à Bègles;

Petit plus de cette exposition les livres proposés aux visiteurs et parmi eux un ouvrage écrit par le père de l'artiste André Henry et illustré par Jean-Paul ....