JEAN-PIERRE FAURIE et moi c'est une histoire d’amitié, ou comment un ami d'ami ...devient un ami ....
Jean-Pierre
Faurie
L’euphorie
des Gens-Pierres
par Laurent Danchin
Jean-Pierre Faurie est un tempérament, un personnage : comme Coluche, dont il partage l’humour à l’emporte-pièce et une certaine façon de jouer l’imbécile pour cacher un sens profond de l’amitié, une humanité chaleureuse et une lucidité sociale sans concessions. Meneur d’hommes (ou de femmes ?) d’une vitalité sans pareille, ce grand vivant a soulevé des montagnes dans le milieu plutôt inerte de l’Education Nationale où il organisait des stages d’arts plastiques pour les « professeurs des écoles » jusqu’à une période récente. Parallèlement c’est aussi un dessinateur et un peintre, passionné d’art brut et d’art populaire comme en témoigne sa série récente des Totems, peints à la Chaissac, et des Jaimôs (pour « gémeaux », son signe astrologique), sculptures mobiles bifaces peintes de couleurs vives. Il a également pratiqué la bande dessinée avec des groupes d’adolescents et essayé toutes les techniques et tous les matériaux au gré des envies et des rencontres.
Pourtant c’est surtout depuis qu’il s’est retiré des villes, libéré des contraintes du métier alimentaire – depuis qu’il a pris sa retraite, pour le dire en langage administratif – que Faurie a pu déchaîner sa fantaisie créative. Désormais il n’arrête plus, pratiquant une peinture d’inspiration rurale, engagée dans la défense du bocage et la dénonciation des catastrophes atteignant son environnement naturel. D’où les cycles, aux titres ludiques comme les calembours qu’il débite en cascades : Rendez-nous nos Haies ou L’Arche de nos Haies (2001), Terres à Rides (2002), Pays-Nages et Pays-Rages (2003), Incendie, Éclipse, Les Écorcés vifs, ou encore Carré à souches, version campagnarde de sa série urbaine Carré de soi et Carré de Moi M’aime, poursuivie en silence comme un dialogue intérieur depuis 1993.
Aujourd’hui c’est un nouveau jeu, plastique et visuel, que s’est inventé Jean-Pierre Faurie, qui le mène, caméra à la main, sur les plages des environs du Mont-Saint-Michel où il photographie les apparitions de personnages – les « Gens-Pierres » – que son oeil parvient à décrypter sur les roches ou sur le sable, parmi les coquillages, les galets et les algues. De retour à l’atelier, à lui ensuite de compléter, au pastel, au crayon ou à l’encre, la figure ou le profil entrevus, dans les marges d’un tirage géant de l’image à laquelle, par principe, il s’interdit de toucher, pour respecter le sujet fourni par le hasard et la nature. De cette étrange collaboration entre le réel brut et son interprétation mentale naît un effet surprenant où le dessin poursuit les suggestions de la photographie, une manière nouvelle de dialoguer avec la nature par laquelle Faurie n’est pas si loin de deux héros du Panthéon de l’art brut : l’abbé Fouré des fameux rochers sculptés de Rothéneuf, qu’il connaît bien, ou le Facteur Cheval qui, déterrant sa « pierre d’achoppement » en 1879, déclarait : « Puisque la nature veut faire la sculpture, moi, je ferai la maçonnerie et l’architecture ! ».
Les enfants regardent les nuages, les taches au sol ou, comme Léonard de Vinci, les vieux murs pour y découvrir des animaux ou des personnages. C’est le fonctionnement même d’une certaine imagination visuelle, particulièrement active à l’origine de l’art populaire d’autrefois : le berger taillant un monstre dans le nœud de sa canne par exemple. Procédant d’une enivrante chasse au trésor préalable, les Photo-Graphies de Jean-Pierre Faurie renouvellent avec talent, dans le contexte d’aujourd’hui, ce plaisir enfantin inépuisable. Pour qui les regarde, de surcroît, l’effet est contagieux et le procédé tourne vite à une véritable pédagogie du regard. « Qui regarde qui ? » demande d’ailleurs l’auteur, ajoutant : « Sommes-nous tout seul quand nous sommes seuls ?”. Visionnaire donc, Jean-Pierre Faurie, ou médiumnique ? Ce serait trop dire. L’œil aux aguets tout simplement, et l’esprit joueur, avec beaucoup de sympathie pour ses muets vis-à-vis et un soupçon caché d’animisme.
Pourtant c’est surtout depuis qu’il s’est retiré des villes, libéré des contraintes du métier alimentaire – depuis qu’il a pris sa retraite, pour le dire en langage administratif – que Faurie a pu déchaîner sa fantaisie créative. Désormais il n’arrête plus, pratiquant une peinture d’inspiration rurale, engagée dans la défense du bocage et la dénonciation des catastrophes atteignant son environnement naturel. D’où les cycles, aux titres ludiques comme les calembours qu’il débite en cascades : Rendez-nous nos Haies ou L’Arche de nos Haies (2001), Terres à Rides (2002), Pays-Nages et Pays-Rages (2003), Incendie, Éclipse, Les Écorcés vifs, ou encore Carré à souches, version campagnarde de sa série urbaine Carré de soi et Carré de Moi M’aime, poursuivie en silence comme un dialogue intérieur depuis 1993.
Aujourd’hui c’est un nouveau jeu, plastique et visuel, que s’est inventé Jean-Pierre Faurie, qui le mène, caméra à la main, sur les plages des environs du Mont-Saint-Michel où il photographie les apparitions de personnages – les « Gens-Pierres » – que son oeil parvient à décrypter sur les roches ou sur le sable, parmi les coquillages, les galets et les algues. De retour à l’atelier, à lui ensuite de compléter, au pastel, au crayon ou à l’encre, la figure ou le profil entrevus, dans les marges d’un tirage géant de l’image à laquelle, par principe, il s’interdit de toucher, pour respecter le sujet fourni par le hasard et la nature. De cette étrange collaboration entre le réel brut et son interprétation mentale naît un effet surprenant où le dessin poursuit les suggestions de la photographie, une manière nouvelle de dialoguer avec la nature par laquelle Faurie n’est pas si loin de deux héros du Panthéon de l’art brut : l’abbé Fouré des fameux rochers sculptés de Rothéneuf, qu’il connaît bien, ou le Facteur Cheval qui, déterrant sa « pierre d’achoppement » en 1879, déclarait : « Puisque la nature veut faire la sculpture, moi, je ferai la maçonnerie et l’architecture ! ».
Les enfants regardent les nuages, les taches au sol ou, comme Léonard de Vinci, les vieux murs pour y découvrir des animaux ou des personnages. C’est le fonctionnement même d’une certaine imagination visuelle, particulièrement active à l’origine de l’art populaire d’autrefois : le berger taillant un monstre dans le nœud de sa canne par exemple. Procédant d’une enivrante chasse au trésor préalable, les Photo-Graphies de Jean-Pierre Faurie renouvellent avec talent, dans le contexte d’aujourd’hui, ce plaisir enfantin inépuisable. Pour qui les regarde, de surcroît, l’effet est contagieux et le procédé tourne vite à une véritable pédagogie du regard. « Qui regarde qui ? » demande d’ailleurs l’auteur, ajoutant : « Sommes-nous tout seul quand nous sommes seuls ?”. Visionnaire donc, Jean-Pierre Faurie, ou médiumnique ? Ce serait trop dire. L’œil aux aguets tout simplement, et l’esprit joueur, avec beaucoup de sympathie pour ses muets vis-à-vis et un soupçon caché d’animisme.
Laurent Danchin
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire