Le rare et précieux travail de MARIE-ROSE LORTET à LA FABULOSERIE-PARIS dans une belle scénographie ( toujours Marek Mlodecki) avec un rez-de-chaussée tout en couleurs et le noir et blanc des Attrape-Monde au premier étage ...
SUPERBE !
"C'est le temps déraisonnable qui rythme les longs cheminements à travers boucles et nœuds, de mon travail. C'est une façon de construire simultanément le fond, les signes et le dessin qui s'y inscrivent, se fabriquent en même temps que l'écriture se développe.
L'existence de ce fond intervient, se déroule au fur et à mesure que la pensée dicte les mots. C'est une acrobatie sans filet."
Et au premier étage ....
"Une poésie, étrange et franche, perle à la surface de ses travaux cousus de mailles serrées ou vaporeuses, enchevêtrées ou ajourées. Cette poésie gagne jusqu’aux titres qui accompagnent les œuvres et les nomment, tels que « Veste-cage », « J’en parle à ma fenêtre », « Habit de ville pour souris des champs »."
Aurélien Lortet a écrit un texte magnifique en 2009 :
La vie s'élabore et se tisse de fils fins, parfois elle est cousue de fils blancs, d'autres fois elle se construit de cotons de couleur. Si la curiosité est notre alliée, fortunés nous serons pour apprécier et nourrir les sentiers de la création. Guidés par cette avantageuse complice et tous nos sens, nous nous apercevrons alors que les entrelacs, les nœuds, les tissages, les tresses et toutes choses entremêlées nous côtoient depuis toujours, sous une forme ou une autre.
Éléments végétaux, racines, lierre qui grimpe vers la lumière des cimes, troncs de glycine qui s'enroulent jusqu'à l'étouffement. Lorsque l'on croise les doigts, c'est déjà un tricot, même le nœud entrelacs des serpents endormis nous annonce l'amorce d'un tissage. De la boucle rebelle à la tresse, il n'y a qu'un geste. Embrasser, s’enlacer, c'est tresser des liens.
Au fil de la vie, Marie-Rose Lortet nous indique son chemin particulier, reflet des mailles de ses jours, incitant nos connexions neuronales vers le complexe tissage qu'est la mémoire. Dans son travail, on retrouve l'instantané du regard qui transparaît aussi dans les poèmes de Kandinsky (klânge) et ceux de J. Prévert, portant un regard sur des images de couleurs qui semblent naïves, mais où le sujet et les petits moments de la vie quotidienne établissent de véritables trésors structurels.
Tout peut être tissé ! Peu importe le matériel, un nid d'oiseau, c'est la poésie magistrale du tissage et de la récupération. Chanvre, plastique, épluchure, fil électrique, papiers de chocolats, fil de fer des bouchons de Champagne, pour Marie-Rose Lortet, tout est le résultat d'un long procédé de fermentation créative où toute chose, à un moment ou à un autre, resurgira, et sera utilisée.
Elle passe son temps en faisant des tresses. Il n'est pas rare de la rencontrer dans un transport en commun avec du fil dans les mains ; elle ne tue pas le temps, elle le gagne, elle l'élabore, elle le prépare, elle le tresse. Jean Dubuffet eut du flair lorsqu’en 1969, il s'intéressa et encouragea cette petite Alsacienne à la chevelure de sainte Marie-Madeleine.
Aux prémices de la naïveté et de la jeunesse s'élaborent « les masques » pour effrayer et calmer les mauvais esprits de l'inconnu. S'ensuivent les longues épopées des « territoires de laines » où les mailles par accumulations formèrent soudain des boursouflures, des excroissances, naquirent « des montagnes dévoreuses de fenêtres… » les araignées ne font pas de fausse maille. Débuta alors, l'époque des fenêtres, petites constructions délicates où se mêlent l'ancien et le nouveau pour nous offrir d'autres horizons. Puis s'érigèrent les sublimes architectures de fils : "paysage cérébral ", architectures de nuages, matérialisation des associations mentales, œuvres rares dans l'histoire de la sculpture car peu d'artistes ont travaillé ainsi l'intelligence du vide avec autant de brio. C'est la "sculpture réinventée ", où l'on oublie la masse matière pour laisser place à l’âme. Ce n'est ni le poids ni la mesure qui fait l'œuvre sinon l'espace qu'elle nomme, par ses vides. La poésie première des mémoires de la rétine.
Avec la maîtrise la plus précieuse et l'acquis de tant d'écritures textiles, elle passe des grands formats aux miniatures en « tricotant à l'épingle » des habits bigarrés pour les rêves inouïs des souris oubliées et chassées de nos demeures. Souris des champs en habits de ville. Vêtements de pluie pour des souris aviateurs. Les mimiques sont des clins d’œil qu'elle fait à son époux Jacques Lortet (1946/2005) unis dans le trait millénaire du pinceau et de l'ajout de la mimique de fils. La trace de l'intention picturale, rehaussée d'un sourire.
Avec « les petits Fragonards » les personnages semblent s'évader hors du cadre. Le personnage devient principal, il s'échappe, plus défini que jamais ; comme réalisé. Ce qui, autrefois, se perdait, se confondait dans un décor onirique et enfantin, aujourd'hui se dessine et s'émancipe vers une nouvelle maturité. Dans les mains de cette artiste particulière, tout peut être tissé, cousu, tressé, emmêlé.
Ariane ne devrait donc pas trop laisser traîner son fil car au hasard d'une rencontre avec Marie-Rose Lortet celle-ci risquerait de s'en emparer, et de multiplier les possibilités de trouver un chemin vers la liberté.
LA FABULOSERIE
52 rue Jacob, 75006 Paris.
Tél : 01.42.60.84.23.
Mercredi/Samedi : 14h/19h
MARIE-ROSE LORTET ET LES GRIGRIS DE SOPHIE
LA FABULOSERIE ET LES GRIGRIS DE SOPHIE
LA FABULOSERIE
UN AUTRE LIEN
UN LIEN VERS MARIE-ROSE LORTET
MARIE-ROSE LORTET ET WIKIPEDIA
(cliquer)
La GALERIE fait aussi librairie ...
Vous pourrez bien sûr retrouver LE livre sorti à l'automne dernier " COLLECTIONNER L'ART BRUT"
*** ET SUR PARIS UNE AUTRE BELLE PROPOSITION AU THÉÂTRE DES DÉCHARGEURS " L'ART DE SUZANNE BRUT"
"Mais qui est cette Suzanne, muette et pourtant très bavarde à l’intérieur, enfermée dans un couvent du Périgord occupé par les Allemands ? Dans un espace où la liberté est restreinte, Suzanne crée, instinctivement et inlassablement. Sous le regard de ses complices, Sainte Jeanne et la Vierge Marie, elle dépeint avec ardeur son monde aux couleurs vives, pour tenter d'oublier l'inoubliable. Et Suzanne connait son art !"
"Il s’agit d’un monologue très bien composé par Michael Stampe, mis en scène avec grand soin par Christophe Lidon et magnifiquement interprété par Marie-Christine Danède. Un moment pur et simple, mais tout en subtilité, un moment qui émeut et fait réfléchir et nous montre que le théâtre n’a nul besoin de déploiements démesurés pour advenir. L’Art de Suzanne Brut nous plonge dans le récit et les pensées d’une femme qui vit dans un couvent. On est dans le sud-ouest de la France, dans les années 1940, en pleine Occupation. D’ailleurs des troupes allemandes se sont installées chez les sœurs. Suzanne est une servante au cœur transparent qui s’exprime par la peinture. Elle broie elle-même ses couleurs avec des résidus de Ripolin, des herbes, des pierres, des débris. Une artiste naïve qui n’a pour interlocutrices que sainte Jeanne et la Vierge Marie. Elle ne cesse de faire leur portrait. Elle s’adresse à elles. Elle les entend. Michael Stampe est un auteur nuancé (éditions Dacre) qui lui-même peint à ses heures et a été frappé par ce musée privé de Dicy, dans l’Yonne, qui se nomme La Fabuloserie. Ici, ce qui subjugue, c’est l’interprétation tout en intelligence et délicatesse de Marie-Christine Danède, installée sur un socle sur lequel passent des images colorées."
Un monologue très visuel ... moi pendant un peu plus d'une heure j'ai "vu" avec émotion les tableaux de Suzanne ....
LE SITE DU THÉÂTRE
LA CRITIQUE DU FIGARO
DANS LA REVUE DU SPECTACLE
JUSQU'AU 23 DÉCEMBRE
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