Certains mots sont probablement aptes à changer le monde, ils ont le pouvoir de nous consoler et de sécher nos larmes. Certains mots sont des balles de fusil, d’autres des notes de violon. Certains sont capables de faire fondre la glace qui nous enserre le cœur et il est même possible de les dépêcher comme des cohortes de sauveteurs quand les jours sont contraires et que nous ne sommes peut-être ni vivants ni morts.
Parfois les mots font que l’on meurt de froid. Cela arrive à Bárður, pêcheur à la morue parti en mer sans sa vareuse. Trop occupé à retenir les vers du Paradis perdu, du grand poète anglais Milton, il n’a pensé ni aux préparatifs de son équipage ni à se protéger du mauvais temps. Quand, de retour sur la terre ferme, ses camarades sortent du bateau le cadavre gelé de Bárður, son meilleur ami, qui n’est pas parvenu à le sauver, entame un périlleux voyage à travers l’île pour rendre à son propriétaire, un vieux capitaine devenu aveugle, ce livre dans lequel Bárður s’était fatalement plongé, et pour savoir s’il a encore la force et l’envie de continuer à vivre.
Par la grâce d’une narration où chaque mot est à sa place, nous accompagnons dans son voyage initiatique un jeune pêcheur islandais qui pleure son meilleur ami : sa douleur devient la nôtre, puis son espoir aussi. Entre ciel et terre, d’une force hypnotique, nous offre une de ces lectures trop rares dont on ne sort pas indemne. Une révélation…
" Le temps a bien des visages, la pendule mesure rarement celui qui passe en notre for intérieur et qui constitue la véritable durée de la vie, d'ailleurs, une foule de jours pourrait tenir en quelques heures et inversement, le nombre des années est une échelle peu fiable pour mesurer la durée de la vie d'un homme, celui qui meurt à quarante ans a peut être vécu bien plus longtemps qu’un autre qui part à quatre-vingt-dix."
" Certains poèmes nous conduisent en des lieux que nuls mots n'atteignent, nulle pensée, ils vous guident jusqu'à l'essence même, la vie s'immobilise l'espace d'un instant et devient belle, limpide de regrets ou de bonheur. Il est des poèmes qui changent votre journée, votre nuit, votre vie . Il en est qui vous mène à l'oubli, vous oubliez votre tristesse, votre désespoir ..."
" Celui qui meurt se transforme immédiatement en passé. Peu importe combien il était important, combien il était bon, combien sa volonté de vivre était forte et combien l’existence était impensable sans lui ..."
" Non les arcanes de l'amour sont impossibles à percer. Nous ne les comprenons jamais. Nous vivons avec une personne et sommes heureux, il y a les enfants,les soirées paisibles et nombre d'évenements quotidiens, mais agréables, et parfois un peu d'aventure, et nous nous disons: c'est ainsi que la vie doit être. Alors nous rencontrons une autre personne, peut être ne se passe t il rien d'autre que cela, elle cligne des yeux et dit une chose parfaitement banale, et pourtant notre sort est réglé, il n'y a aucun espoir, le coeur s'emballe, il se gonfle, plus rien ne compte à part cette personne là et quelques mois ou quelques années plus tard vous vivez ensemble, un monde ancien s'est écroulé et un nouveau s'élève: il faut parfois qu'un monde périsse afin qu'un autre puisse naître ."
UNE CRITIQUE
TELERAMA
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