Voici aujourd'hui un extrait du texte « Saint-Dizier insolite » d’Yvon Lallemand tiré du livre
« Saint-Dizier » ( 1995) :
Le Petit Paris de Marcel Dhièvre
" L’art naïf trouva sa place au royaume des Muses, dans les premières années du XXe siècle, avec le douanier Rousseau et d’autres « artistes simples » qui prouvèrent que l’académisme n’avait pas le monopole de l’art.
A Chartres, Raymond Isidore décora sa maison et son mobilier de morceaux de vaisselle et de verres de couleur, lui donnant un aspect de mosaïques, reliant pour la joie du regard, l’antiquité et le surréalisme. Avec un clin d’œil pour Picasso, souvent vu comme un fantaisiste, on baptisa Isidore : « Picassiette » ; d’autant plus qu’il piquait par-ci, par-là, des morceaux d’assiette pour réaliser son œuvre. La maison Picassiette se visite et ne laisse pas indifférent. Ce pourrait être le cas du « Petit Paris », qui bien que classé monument historique (1984), vendu et revendu, continue à subir les assauts du temps. Ancien magasin, cette petite maison décorée est l’œuvre de Marcel Dhièvre, mort en 1977. Comme « Picassiette », notre bragard naïf a voulu faire de sa maison une œuvre d’art, peignant par-ci, ajoutant des sculptures par-là, collant de l’assiette, du verre, et tout ce qui était à portée de main. Les motifs floraux dominent, surtout des arbres et les branchages. La maison, faisant l’angle d’une « voyotte* », a en figure de proue une scène représentant « le corbeau et le renard ». Scène naïve par excellence, puisqu’elle illustre la deuxième et la plus connue des fables de La Fontaine. Trois colombes complètent l’ensemble. Sur la façade donnant sur l’avenue, au-dessus de l’inscription « Au petit Paris », ayant connotation de magasin de mode d’après-guerre, se trouvent, de part et d’autre de volets malheureusement métalliques et rouillés, deux médaillons représentant, l’un l’Arc de triomphe, l’autre la Tour Eiffel. Ces détails expliquent le nom de la maison, goût qui correspondait au quartier de la Noue, puisqu’on trouvait à deux pas, rue Ernest Renan, « le Moulin Rouge », restaurant et salle pour mariages, et la salle de danse « L’Alcazar ».
Qu’on trouve beau ou pas, « le Petit Paris » de Marcel Dhièvre est une œuvre d’art qui fait partie du patrimoine bragard, et qui mérite mieux que son purgatoire actuel. "
*Voyotte : ruelle bordée de maisons à pans de bois, souvent en torchis.
Le Petit Paris sur les Grigris :
http://lesgrigrisdesophie.blogspot.com/2010/07/le-petit-paris.html
Au Petit Paris - Marcel Dhièvre
478 avenue de la République
52000 Saint Dizier
2 commentaires:
"Art naïf" dit notre auteur du jour, et non "Art brut"...
Preuve, s'il en était besoin que la ligne de démarcation entre les deux est mince et que si l'on ne prend pas en compte la biographie de l'artiste, on peut balancer entre les deux.
A moins d'avoir sous la main un Pape de l'Art brut comme l'était Dubuffet !
j'aime la naïveté quand elle se présente ainsi!
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